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Religion

10 personnalités suisses se confient sur leur rapport à la religion

Dix personnalités de la politique, de l’économie, de la culture et d’autres domaines répondent à l'épineuse question: «où en êtes-vous côté religion?». Ils et elles racontent le rôle que les Eglises suisses jouent dans leur vie.

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Daniel Koch

Daniel Koch a incarné la crise sanitaire du Covid-19 en 2020. 

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1. L'écrivain Lukas Hartmann: 


«Après mes jeunes années avec catéchisme, confirmation et JP (jeunes paroissiens), j’ai pris mes distances avec tout comportement superstitieux. En soi, l’idée d’une puissance aux commandes est jolie. Mais dans l’histoire de l’Eglise, on a malheureusement vu beaucoup de méfaits. La religion m’intéresse à titre de phénomène historique. Lors de voyages en Inde, je me suis penché sur l’hindouisme. Puis sur le bouddhisme, à coup sûr la religion la moins violente, qui m’est devenue la plus familière par sa technique de la méditation. De temps à autre, j’ai songé à sortir de l’Eglise protestante mais j’en suis toujours resté membre. Une décision de bon sens et par respect pour les gens qui s’y engagent. L’impôt ecclésiastique permet de soutenir de bons projets. Je vais à l’église surtout pour des concerts. J’adore la musique baroque. Une «Passion» de Bach avec chœur et orchestre me déchire le cœur. C’est de cette manière que les contenus de la foi m’atteignent».

Lukas Hartmann

L'écrivain Lukas Hartmann.

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2. Philippe Moser, coprésident du Mouvement scout de Suisse: 


- Philippe Moser, quel est le lien entre les scouts et l’Eglise?
- Etant une organisation mondiale, les scouts ne sont liés à aucune religion mais marqués par leur pays. Cet accent peut être musulman, juif ou chrétien. En Suisse, les scouts agissent surtout au niveau local avec les paroisses catholiques ou protestantes. Nombre de brigades ont un chef, un aumônier qui participe aux camps d’été et apporte ses impulsions lors des jours de fête, par exemple les Noëls dans la forêt. Débattre de la spiritualité est essentiel et fait partie de nos fondements. C’est un élément de l’évolution vers l’être humain à part entière.

- Comment avez-vous vécu cette spiritualité?
- Je garde un bon souvenir de deux veillées lors desquelles, au gré d’un jeu de piste nocturne, nous avons été confrontés aux questions existentielles de la vie. Les conversations au camp d’été avec l’aumônier m’ont également marqué. Il a lancé des sujets de réflexion que, sans ça, on ne discute avec personne.

- Où en êtes-vous aujourd’hui côté Eglise?
- Je me rends au service religieux pour des événements comme un baptême ou Noël. Je préfère m’intéresser aux valeurs chrétiennes et à la spiritualité indépendamment de l’institution.

Philippe Moser

Philippe Moser, Coprésident du Mouvement scout de Suisse. 

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3. Regula Rytz, ex-conseillère nationale et présidente d’Helvetas:


«Je ne suis pas une fidèle active, mais une membre convaincue de l’Eglise réformée Berne-Jura-Soleure. J’apprécie son engagement en faveur des personnes en difficulté et du dialogue interreligieux. Dans notre société, l’Eglise est un liant essentiel. Nombre de paroisses prônent une attitude progressiste. L’Eglise réformée Berne-Jura-Soleure s’est notamment prononcée pour le mariage religieux des couples du même sexe. Il existe aussi des instances de conseil juridique pour des personnes en détresse ou des familles trop sollicitées, ainsi que du conseil aux couples. Ces offres existent également à la campagne et s’adressent à tout un chacun, peu importe sa religion. En ces temps de mesures d’économies, l’Eglise assume véritablement d’importantes tâches de l’Etat. Elle prend aussi position sur le plan international: son soutien à l’initiative «Entreprises responsables» est un signe clair de son engagement pour les droits de l’homme et de l’environnement et pour un développement durable.»

Regula Rytz

Regula Rytz, ex-conseillère nationale et présidente d’Helvetas.

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4. Daniel Koch, médecin, «Monsieur Covid-19»:


«J’ai été élevé dans une stricte obédience catholique et je n’en garde pas que de bons souvenirs. J’ai quitté l’Eglise il y a dix ans, mais je ne la condamne pas. C’est surtout lors de mes missions dans des contrées en guerre que j’ai souvent appris à connaître des organisations chrétiennes qui réalisent un travail formidable. Elles restent toujours d’un grand secours. J’ai accueilli chez moi deux réfugiées ukrainiennes. Les démarches administratives sont incroyablement pénibles, tandis que l’Eglise les soutient très humainement, sans bureaucratie.»

Daniel Koch

Daniel Koch a incarné la crise sanitaire du Covid-19 en 2020.

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5. Claude-Inga Barbey, humoriste, comédienne et auteure:


«Je n’ai pas eu une enfance très facile et, petite déjà, j’ai cherché des réponses dans les églises. J’ai même suivi des cours de catéchisme sans en avertir personne. Puis des cours à l’école du dimanche. Je me souviens même d’avoir gagné un petit téléphone rouge, en plastique, qui faisait taille-crayon, pour la meilleure réponse à une question posée par le pasteur. Ensuite, j’ai voulu suivre des cours d’orgue d’église, parce que je trouvais le son apaisant. Puis j’ai grandi et je suis passée à autre chose. Je suis même devenue complètement athée pendant de longues années. Puis, à l’âge de 50 ans, j’ai eu une vision. Un être surnaturel, que j’ai instantanément identifié au Christ, est venu dans ma chambre. Il m’a parlé, de façon télépathique. La foi est descendue en moi, comme une eau tiède bienfaitrice, et je n’ai jamais pu revenir en arrière. J’ai donc décidé de me faire baptiser.

Depuis, Dieu fait partie de mon quotidien. Je ne vais plus à la messe, parce que je trouve le discours des intervenants profondément ennuyeux. De plus, le dogme catholique me révolte souvent. Mais j’aime les rituels, la communion, les bougies, les odeurs… Alors je vais à l’église pratiquement tous les jours, mais hors cérémonie. Je mets deux bougies, une pour mes vivants, une pour mes morts. Je prie, je demande, je remercie. Pour moi, Dieu est partout, si on sait regarder. Je suis d’accord avec Albert Einstein quand il dit que «le hasard, c’est Dieu qui se promène incognito».

Claude-Inga Barbey

Claude-Inga Barbey, humoriste, comédienne et auteure.

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6. Stefan Nünlist, chef de la communication chez Swisscom:

«Je suis un être empreint de spiritualité. Je ressens le lien avec la Création à l’église mais aussi dans la nature. Contempler les montagnes, par exemple, a pour moi quelque chose de très apaisant. Ce qu’il y a de beau dans la religion, c’est tout ce qui relie. Je l’expérimente à chaque fois que, avec le père de mon épouse, nous allons à la messe du samedi soir à Fribourg-en-Brisgau. Comme d’autres sanctuaires, la cathédrale y est un lieu d’énergie. Un talentueux organiste y joue. Ce sont des moments de réflexion sur l’éternité et sur la finitude de l’homme. Pour moi, dans mon travail et comme politicien libéral, le respect face à la Création et l’attention portée à son prochain sont des valeurs cardinales. J’apprécierais plus de mysticisme et moins de sécularité dans l’Eglise. Elle ne doit pas être un parti politique.»

Stefan Nünlist

Stefan Nünlist, chef de la communication chez Swisscom.

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7. Jari Putignano, CEO de la fonderie de cloches Rüetschi:


- Jari Putignano, voilà 650 ans que l’entreprise Rüetschi façonne des cloches. Quelle est pour elle l’importance de l’Eglise?
- Les paroisses sont un de nos principaux clients et nous entendons les aider à relever leurs défis. Bien des églises demeurent vides, il est rare qu’on nous commande de nouvelles cloches. Notre tâche consiste à les entretenir et surtout à prouver que même dans des villes à forte densité les sonneries de cloches sont acceptables.

- Comment vous y prenez-vous?
- En faisant appel à la science et aux nouvelles technologies. Nous avons réussi à faire en sorte que les tintements des cloches soient plus mesurés, de manière à permettre des conversations sur le parvis de l’église. Pour le reste, il faut une maintenance régulière, c’est comme pour une voiture.

- Qu’est-ce qu’un carillon évoque pour vous?
- Bien sûr, j’écoute toujours attentivement, les cloches restent une de mes passions. Il n’y a pas que l’acoustique qui m’intéresse, l’art de leur fabrication aussi. Les cloches sont des témoins artistiques et culturels hors du commun qu’il s’agit de préserver.

Jari Putignano

Jari Putignano, CEO de la fonderie de cloches Rüetschi. 

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8. Jean-François Steiert, conseiller d’Etat fribourgeois:


«Le canton de Fribourg et l’Eglise ont des liens étroits. Comme conseiller d’Etat, je suis en contact constant avec les représentants ecclésiastiques et, avec le gouvernement, nous cultivons les rituels historiques. Une fois l’an, nous faisons un yass avec l’évêque et il nous arrive même de gagner – la dernière fois, c’était avec le soutien du conseiller fédéral Guy Parmelin. Il y a aussi la dégustation annuelle de la bière de l’évêque et le festin d’escargots avec les capucins. Lors de ces rencontres, on parle de tout sans tabou, y compris du rôle de la femme dans l’Eglise ou des abus sexuels. Pour un politicien, ça fait du bien de considérer parfois les choses par l’autre bout de la lorgnette, réfléchir, prendre son temps et de la distance. La relève est une question compliquée, il manque de jeunes vocations. Si un couvent ou une église reste vide, nous tentons de faire en sorte que les lieux deviennent accessibles au public, sur un mode judicieux et digne. Si les Eglises n’existaient plus, elles nous manqueraient. Elles sont un lien social et s’engagent pour la collectivité. C’est hautement nécessaire.»

Jean-François Steiert

Jean-François Steiert, conseiller d’Etat fribourgeois. 

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9. Andre Schneider, directeur général de l’aéroport de Genève:


«Lorsque je travaillais pour le WEF à Davos, j’ai mis sur pied l’Open Forum avec l’Eglise évangélique réformée de Suisse (EERS). Un forum de débat ouvert. A l’époque, le Forum économique était très contesté par les altermondialistes mais aussi par les Eglises. Si la coopération a réussi, c’est largement dû à l’EERS et à son président d’alors, Thomas Wipf. Il a su jeter des ponts et rassembler des gens qui, pour une part, avaient des opinions opposées. Un rapport respectueux et sans préjugés avec son prochain est à mes yeux essentiel. A cet égard, j’ai clairement été influencé par les valeurs chrétiennes fondamentales. Jeune, j’ai fait ma confirmation, comme il était d’usage dans la banlieue de Berne où j’ai grandi. Ensuite, jusque vers 25 ans, j’étais en quête de vérité, je me suis intéressé aux quakers, aux anthroposophes et aux écrits du philosophe jésuite Teilhard de Chardin. Aujourd’hui encore, ce sont les contenus qui m’intéressent, je n’ai pas grand-chose à faire des rituels. Mais mon lien avec l’Eglise protestante subsistera toujours.»

Andre Schneider

Andre Schneider, directeur général de l’aéroport de Genève.

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10. L'alpiniste Evelyne Binsack:


- Où vivez-vous la foi au jour le jour?
- Dans les relations interpersonnelles, dans la nature, dans les diverses formes de manifestation de la Création. Pour moi, l’Eglise est bien plus que ses édifices, même si je les admire et que je m’arrête volontiers dans des sanctuaires. Je juge important que l’Eglise dispense ses valeurs fondamentales à chaque enfant même si, plus tard, on emprunte peut-être d’autres voies. Mais ce consensus sur les valeurs est indispensable pour notre société.

- Quels rituels sont importants pour vous?
- Autrefois, ma mère me donnait sa bénédiction avant que je parte en expédition. Ce rituel m’importait beaucoup. Sa bénédiction signifiait à mes yeux: je suis en accord avec ce que tu fais. Maintenant que ma mère n’est plus là, je le ressens toujours. Notamment quand des amitiés se disloquent. Je cherche alors à laisser partir l’autre sans lui en vouloir et à être en accord avec moi.

- Quelles sont vos attentes de la part de l’Eglise?
- La vérité! Le Vatican doit enfin s’ouvrir et faire son examen de conscience.

Evelyne Binsack

Evelyne Binsack, alpiniste.

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publié le 18 septembre 2022 - 09:54