Si les forêts du globe constituent toutes de précieuses réserves naturelles, celle de la vallée de Lodano au Tessin est dotée d’une valeur particulière. Véritable témoin du passé, tant historique que culturel, elle est désormais inscrite au patrimoine mondial de l’UNESCO. Un aboutissement inattendu, qui couronne plus de dix ans de projets de préservation et de valorisation menés sur place par la bourgeoise du village.
Tout commence en 2010, alors que la bourgeoise de Lodano, propriétaire d’une partie des terres de la région, et les habitants se décident à agir pour préserver la forêt qu’abrite leur vallée en créant un réserve forestière intégrale. Il faut dire que la zone forestière représente l’héritage culturel et économique de toute la région puisqu’elle a permis à ses habitants et acteurs économiques d’y prospérer depuis le 15ème siècle. Son bois a permis de stimuler l’exploitation forestière locale tout en jouant un rôle important dans la production de charbon. On y trouve en effet des traces de plusieurs charbonnières dont l’activité remonte aux alentours de 1400 - 1450.
De l’exploitation à la plus-value écologique
Terminée l’exploitation en 1964, la forêt a repris vigueur et depuis plus de dix ans, les habitants de la vallée ont entrepris différents projets afin de préserver cette précieuse ressource naturelle tout en stimulant les activités de loisirs en pleine nature. Itinéraires forestiers, étang-biotope revitalisé ou encore valorisation du patrimoine historique liée à l’exploitation de la forêt, dont les charbonnières à visiter, constituent autant de démarches et aménagements développés sur place.
Alors qu’ils travaillaient à leur projets, le Canton Tessin et ainsi la bourgeoise de Lodano sont contactés par un groupe de chercheurs internationaux en 2013. Car la forêt se trouve en réalité dans une zone ayant joué un rôle fondamental dans la progression du hêtre après la dernière période glaciaire, elle se trouve en effet sur un réseau de corridors boisés qui ont permis l’expansion du hêtre dans toute l’Europe depuis 12000 ans et qui a concerné le Tessin il y a environ 6000 ans. Le succès de la progression de cette espèce s'explique notamment par son adaptabilité et sa tolérance à différentes conditions climatiques, géographiques et physiques. Une analyse scientifique menée sur le terrain a confirmé aussi la valeur écologique de la forêt de hêtre.
Le hêtre, trésor caché de la vallée de Lodano, classée à l’Unesco
Collaboration régionale, cantonale, fédérale et mondiale
Suite aux recommandations des scientifiques, en 2016 le Conseil fédéral dépose une demande préliminaire dans l’optique d’inscrire cette forêt unique au patrimoine mondial de l’UNESCO. Puis, début 2020, le dossier de nomination est officiellement remis à Paris. Après la visite d’un expert venu sur place, le comité du patrimoine mondial de l’UNESCO finit par inscrire la forêt sur la Liste du patrimoine mondial durant l’été 2021 en tant qu’élément du bien sériel « Forêts primaires et anciennes de hêtres des Carpates et d’autres régions d’Europe » qui compte 94 forêts dans 18 pays e qui témoigne la valeur universelle exceptionnelle de cet arbre.
Pour la vallée tessinoise, cette reconnaissance mondiale représente énormément. Outre la valorisation du territoire et du paysage local, c’est aussi et surtout l’aboutissement d’un long projet mené au niveau régional, cantonal et fédéral. Pour en savoir plus, L'illustré est allé à la découverte de ce lieu spécial en compagnie de Christian Ferrari, président de la bourgeoisie de Lodano.
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