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Stéphane Ranc, le prodige du monocycle

Connu comme discipline de cirque, le monocycle a aussi ses Championnats du monde, où les sportifs montrent leur talent à un jury. Stéphane Ranc, jeune Vaudois, a décroché l’or dans l’épreuve de «flatland» cet été aux Etats-Unis.

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Le champion du monde de monocycle «flatland» Stéphane Ranc

Les lèvres plissées trahissent l’effort de concentration de Stéphane Ranc, 17 ans. Le champion du monde de monocycle «flatland» enchaîne ici les figures, sur le sol et dans les airs, au cirque Snick, à Aigle (VD), fondé par sa maman.

Sedrik Nemeth

Juillet 2024. Bemidji, dans le Minnesota, aux Etats-Unis. Le sourire brille sur le visage de Stéphane Ranc. Le Chablaisien de 17 ans vient de remporter le titre de champion du monde de monocycle «flatland», une compétition où les figures acrobatiques s’enchaînent sur un sol sans obstacles, devant un jury. De retour en Suisse depuis cet été, le jeune champion en parle avec encore des étoiles plein les yeux. «C’était assez incroyable. Je suis allé là-bas avec l’envie de tout donner et de réussir mes figures, mais gagner... Je ne m’y attendais pas.» S’il n’avait pas envisagé cette possibilité, il y était pourtant préparé, surtout avec l’expérience engrangée lors de ses premiers Championnats du monde, à Grenoble, en 2022. «Il y a deux ans, j’étais tout excité à l’idée de participer. Cette fois, j’étais plus concentré.» Dans ce sport de niche où les concurrents sont peu nombreux – 16 participants dans la catégorie «flatland» expert, remportée par Stéphane – l’ambiance est familiale. «On se connaît tous dans le monocycle. On s’encourage, on s’applaudit. La compétition était vraiment fair-play et agréable.»

S’entourer des bonnes personnes


Au sein de cette communauté de jeunes passionnés, Stéphane s’exerce avec ses amis, sans coach officiel. «Tout le monde s’entraîne ensemble, c’est ce qui est génial. Chacun fait sa figure et puis on discute, on se donne des conseils.» En plus de ses entraînements en groupe, le monocycliste a commencé la course à pied pour travailler son endurance et fait aussi du renforcement musculaire. «Pour gagner en puissance et surtout pour éviter les blessures. J’ai eu des problèmes avec ma hanche cette année. Le renforcement m’a permis de continuer à faire un peu de sport. Sinon, on perd vite en musculature quand on est à l’arrêt.»

Stéphane Ranc a remporté le titre de champion du monde de monocycle «flatland» en juillet 2024 aux Etats-Unis

Acclamé par ses concurrents qui sont aussi des amis, Stéphane Ranc a remporté le titre de champion du monde de monocycle «flatland» en juillet 2024 aux Etats-Unis.

 

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Pour le conseiller, le jeune champion peut compter sur ses physiothérapeutes ou encore son ostéopathe. «Il a su s’entourer des bonnes personnes», sourit sa maman, Caroline Ranc. Parmi ces gens se trouve Pierre Sturny, lui-même multiple champion de monocycle. Une rencontre faite au sein de l’école de cirque Snick, à Aigle, fondée par Caroline en 2012. Alors que Stéphane suit des cours à l’école de sa maman, l’ancien champion y intervient comme enseignant. «Pierre venait justement nous montrer d’autres disciplines que le cirque. Il nous a fait des démonstrations de trial (discipline qui consiste à franchir des obstacles, ndlr), et de «flatland». Un jour, il a vu que j’étais motivé et m’a proposé d’aller m’entraîner avec lui. C’est grâce à lui que j’ai rejoint le milieu du monocycle. Maintenant, c’est mon ami, on s’entraîne ensemble les week-ends.»

Un petit monocycle jaune
 

Connue également sous l’identité de Snick le clown, qui a donné son nom à l’école de cirque, Caroline pose un regard empli de fierté sur son fils pendant qu’il enchaîne les figures pour notre photographe. Car si Pierre Sturny lui a fait découvrir le «flatland», c’est bien en famille que Stéphane s’est intéressé au monocycle pour la première fois. «Il devait avoir 8 ans, se souvient Caroline. On avait un petit monocycle jaune qui traînait dans le jardin. Il a appris avec celui-là, mais après il a rapidement évolué.» En grandissant et en progressant, le jeune homme délaisse le petit monocycle jaune. Il fait dorénavant ses preuves avec son propre matériel. «J’en ai deux: un pour le «flatland» et un pour le trial. Pour franchir les obstacles, j’ai un modèle avec des manivelles plus longues pour être plus stable. Les pédales ont des picots en métal qui accrochent aux pieds. Pour le «flatland», c’est le contraire: on préfère que les pédales soient moins adhérentes pour qu’elles puissent bien tourner dans les figures. Le cadre est différent aussi. Pour le «flatland», il y a des angles où on peut poser un pied en équilibre. Pour le trial, il est arrondi, ça évite de se faire mal en tapant dans les genoux.»

Le champion du monde de monocycle «flatland» Stéphane Ranc avec sa mère Caroline

Caroline Ranc (à dr.) peut être fière de son fils: après avoir pris des cours dans son école de cirque, il a su s’émanciper en découvrant tout ce qu’un monocycle peut offrir au niveau sportif.

Sedrik Nemeth

Lors des compétitions, les caractéristiques techniques des monocycles ne sont pas réglementées. Seule l’est l’obligation de porter des chaussures fermées ainsi qu’un casque dans la discipline du trial. La taille de la roue change le style, critère de victoire pour le jury de la catégorie «flatland» des Championnats du monde, mais «chacun vient comme il veut», relève Stéphane, le but étant d’être à l’aise et de présenter une performance constante, autre critère d’évaluation. La difficulté des figures compte également dans la note, ainsi que le «last trick», acrobatie plus poussée qui vient conclure la présentation.

«J’aime la compétition»
 

Ces défis et cette envie de se surpasser en apprenant de nouveaux «tricks» expliquent en partie l’attachement de Stéphane à la discipline. A l’école de cirque, une rangée de monocycles attend d’autres élèves qui s’exerceront à d’autres formes d’équilibre. Stéphane, qui a connu son sport par ce biais, en souligne les spécificités qui ont fait pencher la balance dans sa décision. «La mentalité du monocycle m’a attiré. C’est très familial, pas comme d’autres sports qui sont plus compétitifs. J’ai trouvé vraiment cool d’être entre potes et de rencontrer des gens qui viennent de partout dans le monde. On s’écrit sur les réseaux sociaux ou on échange des vidéos.»

Il ne le cache pas: la solidarité de la communauté de monocyclistes est une motivation et une source de progrès. Stéphane a su s’en nourrir pour arriver au plus haut niveau. «Quand je vois combien il s’entraîne, son titre de champion du monde fait très plaisir. C’est vraiment mérité», lâche sa maman. Des entraînements fréquents, surtout avant les compétitions, que le jeune homme doit concilier avec son apprentissage de constructeur métallique et les moments passés en famille. «Je finis le travail vers 17 heures et je vais m’entraîner. Ensuite, je rentre pour le repas avec la famille. Mes proches sont compréhensifs: parfois, ils m’attendent pour manger.» En 2022, lors des Championnats du monde à Grenoble, la famille de Stéphane l’avait accompagné sur place pour l’encourager. Cette année, le déplacement n’a pas été possible, mais le soutien n’en était pas moins solide. «Les compétitions étaient diffusées en streaming, donc on regardait en direct. On a fait pas mal de nuits blanches à cause du décalage horaire», raconte Caroline.

Un événement qui pourrait bien devenir une habitude, tant Stéphane s’investit non seulement dans le sport, mais aussi dans les concours. «J’aime la compétition parce que ça me met au défi. Même si je ne gagne pas, j’aime y participer pour me surpasser et montrer ce que je sais faire.» D’autant plus qu’il peut partager cette passion avec ses proches, notamment sa petite amie, elle-même championne du monde dans la même discipline. «Je pense qu’il va rester dans le sport, parce que c’est son univers», analyse Caroline. Réaliste, elle ajoute que «c’est tellement un sport de niche qu’il faut avoir des dérivés ailleurs».

Par Sandrine Spycher publié le 8 décembre 2024 - 08:54