Le folklore helvétique a le vent en poupe, comme l’a montré le succès d’«Yverdon2018». Entre vendredi et dimanche derniers, 33 000 visiteurs ont admiré lanceurs de drapeaux, yodleurs et joueurs de cor des Alpes venus faire la démonstration de leurs talents. La prochaine fois, a promis la conseillère fédérale Simonetta Sommaruga dans son discours, «je viendrai avec mes collègues du Conseil fédéral. Nous n’avons que sept voix mais un peu de mal, parfois, à trouver l’harmonie.» Interview
Madame la conseillère fédérale, la Fête romande des yodleurs vous a-t-elle plu?
Beaucoup! J’ai été très, très impressionnée par tout ce que j’ai vu et ravie d’avoir pu participer à ce rassemblement à la fois culturel et populaire. J’apprécie énormément ces occasions de rencontres directes avec la population.
Cela vous a-t-il étonnée de voir que ces traditions étaient aussi vivantes en Suisse romande?
On m’avait dit que c’était une grande fête. Certaines traditions sont peut-être originaires de Suisse alémanique, mais elles sont visiblement bien ancrées ici.
Comment expliquez-vous qu’elles restent si populaires?
Elles aident à se sentir chez soi. Et puis, le yodel parle d’une vie simple, en sécurité. Même si la réalité a changé, ce chant véhicule une nostalgie partagée à laquelle beaucoup de gens peuvent s’identifier.
Qu’est-ce qui vous a le plus marquée?
Le chant du yodel fait passer beaucoup d’émotion, vous touche même si vous ne comprenez pas les paroles. Le cor des Alpes est aussi très impressionnant, sa maîtrise implique un énorme engagement. Un morceau a d’ailleurs été spécialement composé pour cette fête.
Vous-même, vous savez yodler?
J’ai chanté dans un chœur d’église, mais yodler, non.
Quelle forme de musique vous touche le plus?
Le chant, justement. La personne est elle-même un instrument.
Plus que le piano, dont vous jouez?
Mais oui.
Je ne peux pas vivre sans musique
Quelle a été la première émotion de votre vie face à la musique?
J’ai grandi dans une famille musicienne. Mes frères, ma sœur et moi avons tous commencé par la flûte à bec. J’ai de très beaux souvenirs des soirées de réveillon, où nous jouions des morceaux de musique de Noël en famille.
Ne regrettez-vous pas parfois de ne pas avoir poursuivi votre carrière de pianiste professionnelle?
(Elle rit.) Non, non, ce que je fais maintenant correspond plus à mes capacités. Mais je suis toujours très contente d’aller écouter des concerts.
Vous trouvez le temps de le faire?
Bien sûr. Un récital, de la musique de chambre, un opéra, en compagnie de gens avec lesquels on partage ce moment. Je ne peux pas vivre sans musique.
A moi qui ne connais rien au classique, que conseilleriez-vous pour commencer?
(Elle hésite.) Je dirais Les quatre saisons de Vivaldi… Ah! Vous voyez, vous connaissez! Une petite musique de nuit ou La marche turque de Mozart, le Boléro de Ravel… Mais le classique n’est pas quelque chose qu’il faut apprendre à écouter, il faut juste se laisser prendre…
Vous écoutez des airs plus contemporains, de la pop, du rock?
Plus jeune, j’ai dansé sur des airs de rock’n’roll, bien sûr… Lesquels? Ceux qui font bouger les jambes! (Elle éclate de rire.)
Selon une analyse sur les réseaux sociaux parue en début d’année, le fait que vous soyez pianiste revient souvent comme insulte à votre égard…
Ce qui m’a étonnée, c’est que l’on utilise le terme de pianiste comme insulte justement, alors que c’est loin d’être vexant! Le piano est un instrument très complexe, qui demande beaucoup de persévérance, sans parler de la pression des concerts. Je pourrais d’ailleurs utiliser les mêmes termes, complexité, persévérance, pression et respect du tempo pour évoquer la politique. Dans les deux domaines, l’analyse est cruciale, mais l’émotion aussi. Le cœur et la raison.
Etre conseillère fédérale, cela laisse de la place à l’émotion?
Bien sûr, c’est essentiel! Surtout dans les domaines dont je m’occupe, qui ont à faire avec les réfugiés, les enfants, les femmes victimes de violences… Ce sont des domaines très émotionnels.
Et quelqu’un pour donner le tempo, c’est essentiel en politique?
Il est vrai que dans certains domaines, notamment celui de l’égalité salariale ces temps-ci, il faut donner le rythme et l’impulsion si on veut faire avancer les choses.
Avec la Coupe du monde de football, on a entendu certaines voix dire que l’hymne national était trop gentil. Vous, vous l’aimez?
C’est toujours une émotion forte de l’entendre, notamment lorsque je suis en voyage officiel à l’étranger. Et puis, il peut être plus ou moins entraînant selon le tempo auquel il est joué. J’ai notamment pu le constater en Afrique. D’ailleurs, on a parlé d’en changer les paroles, mais jamais la mélodie.
Les matchs, vous les suivez?
Jusqu’à présent, avec le parcours de la Suisse, oui. Ce mardi (3 juillet, ndlr), j’ai changé l’horaire d’une séance pour permettre à mes collaborateurs qui le désirent de suivre la seconde mi-temps. Et j’écouterai d’une oreille ce qui se passe.