Grande, longiligne, la crinière dorée, une dégaine à la fois cool et sophistiquée, elle a tout de la Parisienne BCBG qui respire le bon goût. Et le bon goût, il flotte dans ses veines depuis la naissance. Elle est une des filles de Jean-Stanislas Poniatowski, descendant d’une grande lignée de princes polonais, qui fut durant des années directeur du «Vogue» France, et de Sabine Marchal, décoratrice d’intérieur. Sa sœur, Marie Poniatowski, a lancé Stone, une maison joaillière qui se veut rock et romantique. Donc, l’esthétisme est depuis longtemps accolé au patronyme de la designer. Un nom qui justement a changé lorsque, à 22 ans, en 1995, elle a épousé le chanteur et acteur Marc Lavoine, dont elle s’est séparée en 2018. Ensemble, ils ont eu trois enfants, Yasmine, 24 ans, qui s’est lancée dans une carrière de comédienne, ainsi que Roman et Milo, qui ont respectivement 15 et 11 ans. Elle sourit d’ailleurs quand elle évoque sa progéniture: «Ils sont ma priorité mais surtout je suis leur pilier, leur mur porteur. Où que je sois et avec qui que ce soit, même si c’est le président de la République, il faut que je réponde à leurs appels. Que je sois à leur disposition. En fait, ils n’ont pas vraiment l’impression que je travaille.»
Et pourtant, Dieu sait si elle travaille, Sarah Lavoine. A 49 ans, elle a littéralement construit un empire de la décoration et de l’architecture d’intérieur. Son premier chantier, elle s’en souvient encore, c’était une maison à Paris dans le Ve arrondissement. Puis le bouche-à-oreille a fait son chemin, la presse s’en est mêlée, la première boutique a pointé le bout de son mur. Aujourd’hui, il y a en France 15 boutiques qui portent son nom, 150 points de vente dans le monde, et petit à petit elle s’est bâti une réputation d’incontournable de la décoration et de l’architecture d’intérieur.
Ce qu’elle aime, cette grande fille aux santiags blanches, ce sont les défis. Avec son équipe, qui en 2015 ne comptait que huit personnes, elle participe au concours pour réaliser le siège social de L’Oréal Luxe à Paris. Elle ne pensait pas remporter la palme. Et pourtant, parmi la petite centaine de dossiers, c’est elle qui est choisie. Et la voilà avec 48 000 mètres carrés à imaginer et aménager. Son objectif? Que les gens soient heureux de travailler là. «Mon but, c’est de placer l’humain au cœur de chaque projet.»
Trois ans et demi de chantier plus tard, le résultat est là: des open spaces, des salles de conférences, une salle de sport, cinq restaurants, etc. Tous ces lieux à base de matériaux nobles et naturels, de velours et de papiers peints aux motifs «seventies» sont marqués de l’empreinte reconnaissable entre mille de Sarah Lavoine. Reconnaissable aussi grâce au fameux Bleu Sarah, couleur déposée, qui est un bleu canard qu’elle adore: «Il s’est imposé à moi. Au début, il était juste sur mon logo, puis je suis devenue dingue de cette teinte, je l’ai mis sur un mur, sur un velours, sur une boîte, une lampe, etc. Le Bleu Sarah est devenu notre référence, notre identité. Mais le danger est de s’enfermer dans cette couleur… Pourtant, sur 100 pièces vendues, 80 ont une touche du Bleu Sarah. La difficulté finalement, c’est de se réinventer sans se trahir.» Cette nuance, elle l’a découverte lors d’un voyage en Inde. Car après ses enfants et la déco, les voyages sont sa grande passion: «J’adore voyager et si je pouvais, je ne ferais que ça.» De ses ailleurs, elle emmagasine des couleurs, des formes qui plus tard donneront naissance à de nouvelles créations: «C’est un cercle vertueux: je passe de l’espace à l’objet et de l’objet à l’espace.»
En ce moment, elle rêve du Japon et d’installer son enseigne là-bas. «J’y ai emmené mon fils, dix jours avant le début de la pandémie. Il a 11 ans et comme moi il est devenu fan du pays. Les Japonais ont un savoir-faire et un art de vivre très proche du nôtre, un amour de l’art de la table, des laques, des céramiques… C’est un des rares pays qui échappent à la mondialisation. Quand vous êtes là-bas, vous êtes vraiment à l’étranger, contrairement à certains quartiers de New York qui ressemblent trait pour trait à ceux de Paris.» En attendant de s’attaquer au pays du Soleil levant, la blonde dame vient de poser une partie de son mobilier et de ses objets de déco à Genève. Et nous en sommes ravis.