Le bruit d’un ruisseau charme les oreilles. L’air fleure l’humus et la mousse. On se balade paisiblement, on se baigne dans l’atmosphère de la forêt. Chacun déambule à son rythme, les sens à l’affût. On appelle ça shinrin-yoku en japonais, autrement dit bain de forêt. Une de ces retraites thérapeutiques d’une semaine est organisée au Saanewald Lodge, près de Gstaad (BE). «Comme des nomades qui arriveraient du désert et verraient pour la première fois une forêt de montagne suisse», indique la pub de cette invitation à la promenade.
La journée débute à 7 heures par une séance de méditation. Alors que chacun est assis à moitié endormi sur son coussin, il règne au-dehors une atmosphère magique: les rayons du soleil percent les nappes de brume automnale, la rosée scintille sur l’herbe. Le feuillage vert commence juste derrière le lodge, une prairie naturelle ceint la terrasse.
Saveurs ayurvédiques
Tandis que nous nous recueillons, Melanie Uhkötter chemine au milieu des hautes herbes. Cette Allemande de 33 ans vit au lodge et organise ces séjours détente et yoga aux saveurs ayurvédiques.
A l’origine, le bain de forêt a été développé au Japon il y a plus de quarante ans par des chercheurs, des médecins et le service des forêts. Appuyé par des études scientifiques, «prendre un bain dans l’ambiance de la forêt» – pour reprendre la traduction du terme nippon – a depuis établi son caractère salutaire: les balades en pleine conscience exercent une influence positive sur la pression sanguine, apaisent le stress et renforcent le système immunitaire.
Adapté à l’Occident aux Etats-Unis, le shinrin-yoku a traversé l’Atlantique sous le nom de «forest bathing». Dans les pays nordiques et en Allemagne, on parle déjà d’une mode. En Suisse, l’idée provoque encore des regards étonnés. Aller en forêt? Je n’ai pas besoin de mode d’emploi pour cela!
Test
La coach Nadine Gäschlin guide quand même les adeptes vers une relaxation plus profonde. Un des participants sommeille paisiblement dans l’herbe. Pour elle, ce n’est pas un affront: «Je souhaite surtout ramener les gens à la nature. Nous passons près de 90% de notre temps dans des locaux fermés. Si quelqu’un s’endort pendant le bain de forêt, mon but est atteint.»
La retraite est encore en phase de test. Si celui-ci est réussi, plusieurs semaines seront organisées dès l’été prochain au Saanewald Lodge.
Comme un droit
A noter que les séjours ne fonctionneront pas selon un modèle d’affaires traditionnel. «Il n’y aurait pas de sens à faire du profit avec un concept de promotion de la santé», estime Melanie. Avec Paul Peyer, elle a fondé l’association Friends of Saanenwald, pour que les recettes des inscriptions aux cours cofinancent l’inscription d’autres personnes qui ne pourraient pas s’offrir cette «thérapie nature». Des partenariats avec des fondations, associations et autres institutions devraient appuyer ce projet. Tout le monde a le droit d’accéder à ce type de soin, pensent les deux initiateurs.
Immergé parmi les conifères, on ressent déjà les premiers effets. Les sens sont affûtés, l’esprit reposé. On rentre avec une énergie renouvelée et l’impression d’être tombé sur la plus belle (et la moins chère) oasis de wellness: notre forêt.