Seul sur la scène plongée dans l’obscurité, Garou est assis sur le fauteuil blanc. Dans son dos, le public bruisse. Face au rideau noir, il se demande à haute voix ce que Nikos Aliagas a bien pu concocter. Qui, parmi ses proches, va-t-il voir apparaître à l’occasion de sa venue dans «La chanson secrète»? C’était samedi 22 janvier, sur TF1, le rendez-vous musical où le téléspectateur pleure aussi facilement que les protagonistes. L’émotion jaillit lorsque amis et famille viennent célébrer la victime consentante et lui fredonner son air fétiche. Sous les sunlights, le crooner québécois a d’abord vu apparaître Adamo. Enfant, il l’a découvert en compagnie de ses parents, à l’Olympia. C’était son premier concert et une révélation. Et puis, on a vu arriver un Suisse, et pas n’importe lequel: l’aventurier vaudois Bertrand Piccard, 63 ans. Le visage de Garou s’est illuminé. Mais que faisait là celui dont les exploits ont fasciné le monde, et quel est son lien avec l’inoubliable Quasimodo de la comédie musicale «Notre-Dame de Paris»?
«J’ai connu Garou en Suisse en 2012, grâce à «L’illustré», à l’occasion d’un repas. Le plaisir de la rencontre s’est transformé en amitié. Dès cet instant, j’ai eu l’impression que nous avions toujours été amis», s’enthousiasme Bertrand Piccard au téléphone. «Je déteste les gens blasés. Il m’est arrivé de passer des soirées aux côtés d’acteurs ou de chanteurs sans avoir rien à leur dire.» Avec Garou, 49 ans, c’est autre chose. Les deux hommes ont continué à se revoir au gré de leurs voyages. «Je l’ai emmené survoler le Cervin à bord d’un Beechcraft 55 Baron. Comme il est très sensible aux problèmes d’environnement, on a pu constater le terrible recul du glacier d’Aletsch. Garou était en extase. Nous nous sommes revus à Paris et au Canada. Je l’ai même croisé avec Solar Impulse (tour du monde en avion solaire, ndlr) à Hawaii. Il y faisait de la plongée.»
Lorsque TF1 a fait parvenir l’invitation à Piccard, il n’a pas hésité. «J’ai dit oui, c’était aussi un bon prétexte pour se revoir. Nous sommes aux quatre coins du monde en permanence et la pandémie n’a rien arrangé.» Il fallait aussi que la surprise soit complète. «Ça a fonctionné, preuve qu’en 2022 on peut encore garder un secret. L’émission a été enregistrée le 15 janvier. Dans l’après-midi, pendant les répétitions, sans lui évidemment, c’était joyeux. J’ai retrouvé un autre ami, le chef Marc Veyrat, haut en couleur, en goût et en saveurs.» Et Adamo? «A 78 ans, il ne change pas. Moi qui suis nostalgique de caractère, je me suis revu enfant dans les années 1970. Mais je chante très mal. Si j’essaie, mes enfants disent: «Papa, tais-toi et ferme la porte!»
Le soir de l’enregistrement à la Seine musicale, salle de spectacles posée sur l’île Seguin à Boulogne-Billancourt, le trac était palpable. «J’en ai lâché mon micro. J’espère que ça ne s’est pas vu à l’écran», glisse Bertrand Piccard. Le sourire XXL et contagieux de Garou allait de pair avec l’émotion suscitée par la chanson d’Adamo, «C’est ma vie»: «C’est ma vie. Je n’y peux rien, c’est elle qui m’a choisi. C’est ma vie, c’est pas l’enfer, mais c’est pas l’paradis…» Pour tous les copains, ce fut vraiment le paradis. Piccard jubile: «Nous nous sommes retrouvés en coulisses puis nous sommes partis nous balader dans Paris. On a dîné au Manko, à l’avenue Montaigne, restaurant péruvien somptueux dont Garou est le copropriétaire, et on a bu des verres.»
De son ami Garou, Piccard aime l’album «Seul». Vendu à plus de 3 millions d’exemplaires, il contient des pépites. «Les paroles de la chanson-titre me parlent: «Tant de fois j’ai tenté de toucher les étoiles, que souvent, en tombant, je m’y suis fait mal.» On a tous connu des échecs avant les succès.» La prochaine fois que Garou viendra en Suisse, son ami Bertrand l’emmènera de nouveau dans les cieux. «Pour un voyage en montgolfière cette fois!» Il ne reste plus qu’à fixer la date.