En salade, en purée, en robe des champs, sous forme de frites, de röstis, chaudes ou froides, avec de la sauce ou du beurre, de la viande, du fromage ou du poisson, la pomme de terre fait partie de ces produits que l’on consomme si régulièrement qu’on n’y pense même plus. Chaque année, les Suisses en consomment 350 000 tonnes, soit environ 45 kilos par habitant! Et parmi ces pommes de terre dont grands et petits se régalent, il y a celles de Flavien Nicod, cultivées avec passion à Granges-Marnand, dans le canton de Vaud.
Il y a des siècles que les Nicod sont établis dans le village broyard, et depuis 1815 la famille se consacre exclusivement à l’agriculture. Flavien est le représentant de la septième génération sur le domaine, qu’il gère avec son père, Bernard, et sa mère, Corinne. «Elle s’occupe de la comptabilité. Mon père et moi, on lui donne des gribouillis qu’elle met au propre», sourit l’agriculteur de 32 ans.
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La pomme de terre est aujourd’hui la principale culture des Nicod. C’est une option qui a été prise il y a quelques années, lorsque Flavien a convaincu son père d’arrêter la production de lait et de se lancer dans cette nouvelle culture. Aujourd’hui, père et fils cultivent 20 hectares de pommes de terre sur les 39 que compte leur domaine. A part ça, Flavien vient de planter un champ de fraises, cultive des céréales et des betteraves sucrières, élève une cinquantaine de têtes de jeune bétail et des poulets, dans un poulailler de 600 m2. On l’a compris, le jeune agriculteur est entreprenant, il sait où il veut aller et il y va franchement. Pourtant, adolescent, il avait choisi une autre voie. «A 16 ans, j’ai fait un apprentissage de polymécanicien chez Bobst, à Prilly (VD), où je suis resté ensuite quatre autres années. Je gagnais bien ma vie, c’était confortable. Mais je suis resté attaché au domaine et j’avais envie de devenir indépendant.»
A 24 ans, il commence donc un second apprentissage, celui d’agriculteur. Un métier qu’il aime et pratique selon certaines règles. Pour lui, le bio n’est pas une option, il revendique une agriculture productrice et conventionnelle. «Nous utilisons des produits phytosanitaires pour garantir des produits de qualité. Mais nous le faisons de manière réfléchie, en utilisons le moins possible. Les excès qu’il y a eus dans le passé ne sont plus de mise aujourd’hui. J’ai la responsabilité d’un patrimoine familial, je ne vais donc pas faire n’importe quoi sur ces terres, je veux les sauvegarder. Elles ont appartenu à mes grands-parents et demain elles reviendront peut-être à ma fille.»
Nadège a 9 mois et, avec sa mère, Fabienne, elle est au centre de la vie du cultivateur. La petite famille vit à Vucherens, à 15 minutes de Granges-Marnand, car à la ferme habitent encore les parents et les grands-parents de Flavien.
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Mais revenons aux pommes de terre. Les Nicod en produisent entre 700 et 800 tonnes par an, et elles sont toutes vendues à la coopérative Fenaco, qui ensuite les distribue à différents utilisateurs, en fonction des variétés. La Celtiane intègre le circuit des pommes de terre primeurs, la farineuse Agria part dans l’industrie pour se transformer en frites, tandis que les rondes Pirole et Levinata deviennent ces bonnes chips suisses que l’on déguste toute l’année à l’apéro, avec les grillades ou en pique-nique.
En général, les pommes de terre sont plantées en avril et elles ont besoin de 90 à 120 jours pour accomplir leur cycle. Une plante mère donne entre neuf et 15 patates. Elles sont récoltées d’août à octobre. «Pour l’arrachage, j’engage quatre personnes. Sur la machine, deux d’entre elles s’occupent de la terre et des cailloux, et les deux autres trient les pommes de terre. Les toutes petites patates servent d’aliment pour les animaux. Les autres doivent avoir un certain calibre, en fonction de ce à quoi elles sont destinées. Pour les chips, par exemple, leur diamètre doit être compris entre 42 et 70 millimètres. Ce n’est pas une culture facile à conduire, il y a de nombreux critères − calibre, test de friture, etc. − et un cahier des charges à respecter. Mais avec l’expérience et la passion, on y arrive. Pour réussir, il faut beaucoup de professionnalisme.»
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Quand il n’est pas aux champs ou au bureau, Flavien Nicod passe du temps en famille. «On aime marcher, skier. Et une fois par année, on fait un voyage. Avec Fabienne, nous nous sommes mariés en 2018, mais ça fait déjà quatorze ans que nous sommes ensemble. Fabienne vient de Mézières, où son père est boucher. Mon beau-frère me dit toujours que le lard, c’est la vie. Moi, je lui réponds que la vie, c’est les patates!»
Et puis Flavien regarde sa femme et sa fille, il sourit: «Avant les patates, avant toute chose, ce qui compte, pour moi, c’est la famille. Ma vraie valeur est là.»
Une action pour les agriculteurs
«Plus de Suisse dans l’assiette» est une campagne menée par «L’illustré» en collaboration avec AMS Agro-Marketing Suisse et l’Union suisse des paysans (USP). Le site www.a-la-ferme.ch recense environ 2000 magasins à la ferme qui offrent des produits régionaux. Plus d’informations sur www.patate.ch, www.agriculture.ch ou www.suissegarantie.ch