C’était en 2017. L’actrice Alyssa Milano incitait les femmes victimes de harcèlement à témoigner sur Twitter en utilisant le mot-clé #MeToo. Repris dans le monde entier, ce hashtag devient le symbole de la libération de la parole autour des violences sexistes et sexuelles. Tremblez, violeurs et harceleurs, dorénavant on #balancesonporc!
Si on ne peut que se réjouir que les langues se délient, une question me taraude. Cette parole, est-elle vraiment entendue par la justice? Les chiffres de l’institut GFS (2019) font froid dans le dos: 8% seulement des femmes victimes d’agression sexuelle déposent une plainte pénale. Face à une machine judiciaire qui paraît insurmontable, elles renoncent à porter plainte. Et quand on lit les témoignages de Julie Hugo et de Heidi, on comprend pourquoi.
Lenteur de la procédure, circulation de l’information inexistante, lacune dans la prise en charge des victimes, démarches administratives kafkaïennes – Julie Hugo a dû raconter 27 fois (27 fois!) son viol et son tabassage aux médecins, à la justice, à la police, à l’ORP, etc. Pour un résultat dérisoire. Condamné en première instance à une peine privative de liberté avec sursis, son agresseur ne passera pas par la case prison. Reste l’appel.
Avec son procès, Heidi pensait pouvoir entrevoir une forme de soulagement. L’homme incestueux écope de 12 ans de prison. Il fait appel. Depuis l’ouverture de la procédure, il n’aura pas passé une seule journée en détention.
Conseilleraient-elles à d’autres femmes de porter plainte? «Oui, mais nous serons là pour les soutenir.» Heidi a fondé une association pour venir en aide aux victimes, que Julie Hugo a rejointe. Pour accompagner les victimes dans ce long chemin de croix dont on ne ressort jamais indemne.
>> Retrouvez le magazine en kiosque au prix de 5.50 frs.