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Tout un roman

Nathalie Rheims: «J’écris pour lutter contre l’oubli»

Comédienne, chanteuse, journaliste, productrice, Nathalie Rheims est également romancière. Elle raconte ce qui l'a menée à l'écriture, ainsi que sa rencontre avec Claude Berri.

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Nathalie Rheims

Comédienne, chanteuse, journaliste, productrice, elle est également romancière. Elle a été la compagne de Claude Berri, réalisateur («Tchao Pantin») et producteur («Bienvenue chez les Ch’tis»).

Philippe Conrad

«Mon frère Louis a disparu à 33 ans, emporté par un cancer de la lymphe. Nous étions extrêmement liés. Après sa mort, il ne restait rien de lui. Si le temps passe, la blessure reste. J’avais aimé comme une groupie, sans le connaître, l’immense comédien Charles Denner. Lui avait disparu en 1995 et pas un livre ne retraçait sa vie et sa carrière. Je constatais, pensant à ces deux êtres: «L’oubli, en fait, ça va très vite.» Or, pour moi, écrire, c’est déterrer, lutter contre l’absence et l’oubli. J’allais donc consacrer un ouvrage à Charles Denner. J’ai contacté son agent en le suppliant de me donner une piste pour remonter le fil de sa vie. J’ai ainsi obtenu le téléphone de Maryse Denner, sa veuve. Elle m’a ouvert tous ses albums. On a parlé de la guerre. Charles Denner avait été un résistant. Le soir, j’ai pris un cahier à spirale comme une écolière et j’ai rédigé. J’étais portée par le récit de sa vie et aussi par le vide laissé par mon frère. Tout au long de mon travail, leurs existences allaient s’agréger, d’où le titre de mon futur roman, le premier des vingt-trois, paru en 1999: «L’un pour l’autre».

A la relecture, l’agent de Denner me fait remarquer que j’ai fait l’impasse sur le cinéma. Il me propose des noms de réalisateurs emblématiques ayant travaillé avec le comédien, parmi lesquels Claude Berri. Je prends rendez-vous et j’arrive pétrifiée. Il n’a pas l’air commode et je tombe le pire jour de sa vie. La veille, son fils Julien s’est jeté du 5e étage de l’hôtel Raphael. Berri a oublié de me décommander. Il vient d’apprendre que son enfant ne remarchera jamais. Là, tout s’est mêlé en moi. La mort de mon frère, Charles Denner, Claude Berri, l’accident du fils… «Je n’ai rien à vous dire», m’a-t-il fait savoir.

J’ai répondu: «Je ne vous demande rien. Mais est-ce que je peux faire quelque chose pour vous?» Il me regarde et me lance: «Qu’est-ce que vous voulez faire pour moi?» En quittant les lieux, je me suis sentie stupide. Dehors, assise sur le trottoir, je me suis mise à sangloter. Tout remontait. Vers 16 heures, le téléphone a sonné chez moi: «C’est Claude Berri. Vous m’avez dit que si j’avais besoin de vous, je pourrais vous appeler. J’ai besoin de vous.» Il m’a donné rendez-vous au bar du Bristol. J’y suis allée, tenant ma promesse. C’est comme ça que notre relation a démarré. Elle a duré jusqu’à sa mort, en 2009. Parallèlement, je débutais en littérature par une histoire qui n’était pas banale. La force et la magie de l’écriture, c’est ça: du roman dans le réel.»

Son actu 

«Au long des jours» (Ed. Léo Scheer) raconte une passion secrète et vraie. A 18 ans, l’auteure s’éprend d’un homme de 55 ans. Elle ne le nomme jamais, c’est le chanteur Mouloudji. Seul indice, la photo d’eux en couverture. Ici, l’amour n’a pas d’âge, pas d’entraves. Il palpite et triomphe à chaque page.

Par Didier Dana publié le 20 février 2023 - 08:41