La veille de notre venue, Nicolas Riard a reçu un appel. Un jeune homme dans la difficulté voulait dormir à la gare de Sierre. L’officier de l’Armée du Salut a tout lâché et l’a accompagné jusque tard dans la soirée, le logeant dans le studio prévu pour les cas d’urgence. Il a sauté le repas du soir qu’il prend normalement en famille et c’est sa femme, Nathalie, qui s’est chargée des quatre enfants du couple, âgés de 7 à 17 ans. Une journée comme une autre pour eux, qui ne cessent de s’organiser pour proposer des solutions aux plus défavorisés. «Nous sommes des gens de terrain, qui retroussent leurs manches, vivent avec les gens, partagent la parole de Dieu», dit-elle avec énergie et bonne humeur.
Leur léger accent les trahit. Le couple est arrivé en Valais en 2015 de Tramelan, dans le Jura bernois. A l’Armée du Salut, on ne choisit pas où l’on va, on peut même être déplacé rapidement si un besoin se fait sentir ailleurs. Ils ont ainsi débarqué à l’autre bout de la Suisse romande après avoir été formés ensemble pendant deux ans, à Bâle. Une nouvelle vie a commencé pour eux, alors que jusqu’ici Nathalie était plutôt présente au foyer et son mari engagé à l’extérieur, dans le domaine social.
Tous deux avaient beau être en couple depuis 2003, ils n’avaient jamais travaillé ensemble. Là, ils allaient occuper la même fonction, avec le même (modeste) salaire. «Or nous avons tous les deux un sens du leadership assez fort, sourit-elle, Tout ne s’est pas fait tout de suite. On a dû se chercher, accepter que nous n’étions pas fusionnels dans le travail.» Ils se sont réparti les tâches. Comme Nicolas n’aime pas trop être à l’avant-scène, elle se charge du volet pastoral, mène les célébrations, l’animation des groupes d’études bibliques ou d’éveil à la foi pour les enfants. Lui assure l’aspect social: «Mon meilleur moment, c’est de boire un café avec les gens qu’on accueille. Il est toujours beau d’échanger, cela m’apporte beaucoup.»
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Ils se regardent. Deux mots les unissent, confiance et foi. «Sans la confiance réciproque, avec les personnes qu’on croise, cela pourrait faire mal au niveau du couple et de la famille, dit-il. Chacun de nous donne son appui mais on se dit parfois: «Fais comme tu penses…» Elle se souvient des paroles d’une pasteure, qui les avait prévenus de ne pas déverser leur trop-plein d’émotions à leur conjoint: «Cela peut effectivement être un danger.»
Mais une vague les emporte. «Notre foi commune est notre plus grande force», dit-elle, et il acquiesce: «Elle permet de se comprendre l’un l’autre, de supporter un métier qui n’est pas réglé comme tout le monde.»
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