Dans le milieu de la pop, l’allure des stars fait rêver le public et lui inspire souvent les nouveaux canons de la mode et de la beauté. Un pouvoir qui découle tout autant de qualités musicales que de l’apparence.
A l’ère du tout-image, elle rime souvent avec extravagance. Le look, c’est le métier de l’Américaine Mylah Morales. Depuis plus de vingt ans, cette celebrity make-up artist est au sommet dans la galaxie du show-business américain. Elle façonne à travers de subtils effets de maquillage le visage d’icônes de la chanson et du cinéma. Mylah a «inventé» Robyn Fenty, alias Rihanna. «Je l’ai connue à ses débuts, elle avait 17 ans. J’ai créé ses looks les plus iconiques. Nous nous sommes rencontrées sur le tournage d’un clip. Elle n’était alors qu’une ado parmi dix inconnues. Nous avons fait décoller sa carrière en imposant son image. J’aime faire naître les choses à partir de rien et que le résultat ait l’air cossu.»
L’Elle américain a donné à Mylah Morales le sobriquet de «Glaminator». La semaine passée, cette petite femme énergique d’origine philippine, mère d’un enfant de 14 ans, habillée d’un jogging sport chic, a quitté son quartier de Beverly Hills, à Los Angeles, pour venir découvrir et s’imprégner des montagnes et des vignes de Suisse romande. Le but? Rechercher des produits 100% naturels. Sa marque, Mylah Beauty, finalise en collaboration avec Marielle Descamps et l’entreprise Phytosanté, basée à Lausanne, l’élaboration d’une ligne de produits cosmétiques fabriqués à Aigle dans les usines de FCC (Fragrances, Cosmetics & Consulting).
«J’en ai marre de sauter d’un jet à l’autre, de dormir deux heures par nuit et de manger n’importe quoi. Mon nouveau projet est ma priorité. Nos produits sont bios. Ils seront disponibles en septembre», dit-elle, ébahie par la beauté de nos montagnes, les standards de qualité helvétiques et la quantité de raclettes que les Valaisans lui servent, elle qui surveille sa ligne et se nourrit d’une salade mêlée. «J’ai vraiment envie de m’acheter un pied-à-terre ici», dit-elle sous le regard dubitatif de Christopher Kaufman. Son avocat venu suivre les transactions avait finalisé l’accord de 4 milliards entre George Lucas et l’empire Disney. Il ironise, un brin paternaliste: «Elle dit ça à chaque fois.»
Si Mylah Morales aspire à un retour aux sources, c’est qu’elle a connu une vie de dingue dans le sillage de Rihanna. Pochettes de disques, clips, tapis rouges, séances photos, tournées et tours du monde: lorsque la star souriait, sa dame glam n’était jamais loin. «Nous avons collaboré pendant quatorze ans. En 2005, Ri avait l’image de la fille d’à côté, mais dès son troisième album, Good Girl Gone Bad en 2008, le changement a été radical.»Rihanna devenait la nouvelle reine du R&B. Un phénomène mondial et sexy. «Il y a eu une demande incessante de la part de la presse, des magazines, des shows télé. Nous devions innover chaque semaine. Le look, c’est ce qui vend l’image.» Et la pression? «Elle est énorme et incessante. Les gens vous observent et ils se demandent: «Qu’est-ce qu’elle va faire le coup d’après?» Vous devez être au sommet de votre art et en compétition permanente avec vous-même.»
«La sobriété, c’est la clé»
Depuis sa plus tendre enfance, Mylah Morales n’a qu’un but: magnifier les autres. «Petite, c’était plus fort que moi. Je maquillais mes cousines pendant les vacances d’été et les prenais en photo. Il fallait que je rende les gens jolis. Après mes études en internat aux Philippines, j’ai travaillé pour des groupes cosmétiques.» M•A•C puis Make Up For Ever avec Dany Sanz, la pionnière dans le maquillage de théâtre et de ballet.
«J’ai commencé à collaborer dans la musique avec Puff Daddy. Homme ou femme, peu importe. Devant une caméra, vous devez soigner votre apparence et votre peau.» Dès lors, Mylah Morales allait se frotter aux meilleurs photographes et réalisateurs. On ne compte plus les couvertures de magazines pour lesquelles elle a joué du pinceau: Time, GQ, Harper’s Bazaar, les publicités pour Puma ou Nike. Au cinéma, elle a fait naître le personnage de Bubble. Un alien bleuté et gélatineux capable de se changer en vamp brune ou blond platine incarnée par Rihanna dans Valérian et la Cité des mille planètes de Luc Besson. «En découvrant le résultat, j’ai eu envie de pleurer. Mon rêve devenait réalité.»
A ce niveau d’excellence et de créativité, le métier de Mylah Morales est un art. «Surtout quand le maquillage ne se voit pas. Ensuite, on peut provoquer. Lorsque nous mettions du vert sur les lèvres de Rihanna, je pouvais mesurer le pouvoir des images en retrouvant cette carnation sur les lèvres des ados dans la rue. Je me disais: «Mon Dieu, c’est à cause de moi!»
Son tableau de chasse fourni contient les noms les plus prestigieux: J. Lo, Shakira, Leona Lewis, Jada Pinkett Smith et sa fille Willow. «J’ai travaillé à assagir l’image de Nicki Minaj, passant d’une tonne de make-up à une beauté sans excès.»
Mylah Morales n’aime pas l’allure de la jeune génération. «Sur Instagram, ils perdent leur créativité, pensent qu’il faut être à l’image des autres et se ressemblent tous. C’est ennuyeux. Tout m’inspire. Les stars des années 60, Bardot ou Sophia Loren, jusqu’à l’architecture. Ma génération n’avait pas la puissance des médias sociaux, mais son ancêtre, MySpace. En 2018, ma devise est less is more: la sobriété, c’est ça, la clé.»