Qui n’a jamais eu mal au dos? Ces douleurs sont parfois chroniques, parfois dues à l’âge, parfois déclenchées par des activités sportives, mais quoi qu’il en soit nous sommes tous touchés. Alors autant savoir de quoi il en retourne et s’il y a des solutions pour moins souffrir.
- Selon un récent rapport de la Ligue suisse contre le rhumatisme*, la proportion de personnes souffrant d’un mal de dos est passée de 39 à 50% entre 2011 et 2020. Comment expliquer cette augmentation?
- Dr Stéphane Genevay: La problématique du mal de dos ne fait que croître, c’est certain. Il s’agit de l’un des problèmes de santé les plus répandus dans le monde. Mais ces chiffres suisses sont plus complexes qu’ils n’en ont l’air. Ils ne sont pas forcément le reflet d’un mal se propageant aveuglément, mais plutôt de la proportion croissante de personnes qui souffrent du dos et à qui cela pose problème au quotidien. Ce constat est à inscrire dans une société toujours plus exigeante vis-à-vis de l’individu. Il est en effet de moins en moins possible d’écouter son corps et de simplement lever le pied quelques jours.
- Le monde du travail est également pointé du doigt comme cause directe du mal de dos…
- Les situations sont bien sûr à évaluer au cas par cas. Mais il est certain que la vie professionnelle peut avoir des impacts physiques et psychiques particulièrement délétères pour le dos. Physiques, au travers de postures inadaptées ou inscrites sur de longues durées. Et peut-être plus encore psychiques, en raison des tensions importantes qu’il peut engendrer. Or on sait que le stress excessif, celui qui nous dépasse, a des répercussions réelles sur le fonctionnement neuromusculaire. Le dos est alors immanquablement impacté.
- Quelles sont les clés?
- Le meilleur allié de notre dos, c’est le mouvement! Notre corps supporte mal l’immobilité et, à l’inverse, il est désormais clairement prouvé que l’activité renforce toutes les structures du dos. Des disques aux articulations en passant par la lubrification des structures: l’ensemble de la colonne vertébrale en tire profit. Au quotidien, il s’agit donc d’alterner les postures pour «aérer» le dos. Si notre activité professionnelle nous contraint par exemple à rester huit heures par jour devant un écran, il est nécessaire de «casser» les postures statiques qui ankylosent le dos. Les réflexes à intégrer: se lever au minimum une fois par heure pour faire quelques pas ou exercices, s’étirer. Sur la semaine, l’idéal est de glisser une activité physique régulière et plaisante, sur la base par exemple de séances de 20 ou 30 minutes deux ou trois fois par semaine. La recette est aussi simple qu’efficace.
- Mais pas évidente à respecter quand on souffre justement d’un mal de dos…
- Et pourtant, même en proie à la douleur, l’exercice est ce qui fonctionne le mieux. Aujourd’hui, les nouvelles recommandations médicales font même passer activité physique, physiothérapie active et techniques de relaxation avant la prescription de médicaments antidouleur. Naturellement, l’activité est à adapter à la situation et à la douleur. Les messages émis pendant des années et préconisant l’immobilité totale en cas de douleur ont fait beaucoup de mal à nos lombaires et ont malheureusement la vie dure.
- Quels remèdes préconisez-vous quand le mal de dos survient?
- L’application de chaud ou de froid sur la surface douloureuse peut être efficace, tout comme la pratique d’exercices doux pour décontracter le dos. La question de la prise ponctuelle de paracétamol ou d’anti-inflammatoires reste ouverte. Si elle n’est plus recommandée en toute première intention, elle peut permettre de soulager plus rapidement une crise aiguë et de remettre le dos en mouvement plus facilement.
- Quand faut-il consulter?
- Le plus souvent, une crise de mal de dos passe d’elle-même en trois à cinq jours. Mais si les douleurs persistent avec une intensité inhabituelle, génèrent de l’inquiétude ou s’accompagnent d’autres symptômes, comme de la fièvre ou une perte de force dans un membre, une consultation médicale est nécessaire. Le recours à l’imagerie, IRM en particulier, peut alors être utile dans ces cas-là, et dans ces cas seulement.
- L’IRM n’est donc pas nécessaire pour un «simple» lumbago…
- C’est inutile, voire contre-productif. Et pour cause, le risque est de repérer des anomalies bénignes, souvent sans lien avec la douleur, mais qui vont provoquer une nouvelle inquiétude. Vient alors un réflexe humain: l’envie de «se ménager». Et s’enclenche le cercle vicieux du manque d’exercice, qui crispe le dos, provoque des douleurs, incitant à moins bouger, ce qui accroît encore le problème…
>> Plus d'informations sur www.ligues-rhumatisme.ch
>> Vous pouvez lire «J’ai envie de comprendre le mal de dos» par Stéphane Genevay et Elisabeth Gordon aux Editions Planète santé, 2014
*Rédigé en collaboration avec Planète santé
Terminologie: lumbago ou mal de dos?
Les deux termes cohabitent et peuvent prêter à confusion. Dans les faits, la lombalgie commune est la forme la plus fréquente de mal de dos. Elle correspond à une douleur située dans le bas du dos, susceptible de descendre jusqu’aux pieds et de remonter jusqu’à la nuque. On parle de lumbago lorsque la lombalgie commune apparaît brutalement et est particulièrement invalidante.