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L'édito

L’indifférence et l’égoïsme tuent!

Alors que, dans les sondages, 80% des Suisses se déclarent favorables au don d’organes, notre pays a l’un des plus hauts taux de refus d’Europe. Entre méconnaissance, tabou et indifférence, le journaliste Christian Rappaz est parti à la rencontre de patients qui vivent dans une attente insoutenable. Un dossier à lire dans le dernier numéro de «L'illustré» actuellement disponible en kiosque.

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Don d'organes en Suisse
Shutterstock

Huitante-trois. C’est le nombre de personnes mortes en Suisse l’an dernier faute d’avoir reçu à temps l’organe qu’elles attendaient depuis des mois et parfois même des années. C’est presque trois fois plus qu’il y a vingt ans (32 en 2001). Fin 2022, 1442 patient(e)s se trouvaient sur liste d’attente. Comprenez: engagées dans une impitoyable et funeste course contre la mort.

C’est le cas de Michel (article à lire dans la version papier du magazine disponible en kiosque), un quadragénaire valaisan en attente de poumons depuis près de quatre cent cinquante jours, et d’Alexandre, un bambin de 5 ans en traitement depuis trois ans en vue d’une future greffe de cœur. Ses parents, qui se relaient jour après jour à son chevet, nous racontent cette interminable attente, rythmée de crises qui ont déjà failli emporter plusieurs fois leur enfant. Michel n’en est pas encore là mais doit faire face au quotidien à cet inexorable compte à rebours. 

Pour une personne en bonne santé, l’importance du don d’organes est difficile à saisir. D’autant plus que les informations liées à cette thématique, restant trop souvent taboue, sont encore méconnues. Qui sait par exemple que la loi sur le consentement présumé que nous avons validée dans les urnes en mai 2022 et qui devrait améliorer la situation n’entrera en vigueur qu’à l’horizon 2025, au mieux? Qui sait que, sur les 74 425 décès enregistrés en Suisse l’année dernière, 1000 personnes seulement étaient éligibles pour un don d’organes? Et, enfin, qui sait que, parmi ce millier de donneurs potentiels, une majorité d’entre eux, le plus souvent via leur famille, a refusé? Alors que, dans les sondages, 80% des Suisses se déclarent favorables au don d’organes, notre pays a l’un des plus hauts taux de refus d’Europe. 

Pendant ce temps-là, une à deux personnes meurent chaque semaine et d’autres traversent des épreuves inhumaines, attendant en vain ce coup de fil libérateur et salvateur leur annonçant: «Nous avons un organe compatible pour vous.» Et si, demain, c’étaient nous, les personnes en bonne santé, ou un de nos proches, qui étions concernés? Comment vivrait-on l’indifférence et l’égoïsme des autres en attendant que le téléphone sonne ou la mort?

Par Christian Rappaz publié le 21 juillet 2023 - 10:02, modifié 21 juillet 2023 - 10:51