Michel del Castillo a passé la plus grande partie de son existence à écrire. Pour traquer ne serait-ce qu’une minuscule part d’humanité chez ses parents. Des parents qui ne lui ont jamais témoigné la moindre parcelle d’amour. Au fil de ses magnifiques autofictions, ce grand écrivain a, pour le citer, «[tenté] de reconstituer un récit qui s’est déroulé à [son] insu» et de recoller les pièces d’une identité pour mieux se définir comme homme. Tanguy est l’ouvrage des débuts. Celui sur lequel il a bâti son œuvre. Mais «De père français» est probablement le plus poignant car il aborde la quête du père ainsi que, bien sûr, la fameuse mort du père. Cette mort freudienne qui permet à l’humain de se dépasser et d’être lui. Simplement lui. Et del Castillo de citer Dostoïevski en épigraphe: «Il est des enfants […] qui, dès leur enfance, ont été offensés par la laideur morale de leurs pères […].»
Alors, vous demandez-vous, pourquoi est-ce que j’en viens dans cet édito à citer Michel del Castillo et Dostoïevski? Parce que, comme dans un concours de circonstances, au fil des pages de cet «Illustré», nous avons rencontré et dressé le portrait de deux hommes, deux générations d’écart, deux destinées totalement différentes mais sur lesquelles l’ombre de l’image paternelle plane encore. Il y a d’abord le comédien Jean-Luc Bideau, qui à cœur ouvert raconte comment, lorsque ses parents ont divorcé en 1943, il a dû rester, à l’âge de 3 ans, avec un homme incapable d’aimer. Un homme qu’il a méprisé car il n’avait pour rêve que de se hisser au centre d’une bourgeoisie genevoise qui n’en avait cure et que son fils, en «faisant le clown» et en étant lui-même, a séduite sans effort.
>> Lire aussi: Bertrand Piccard: «J’ai soudain été... moi-même!»
Autre parcours filial, celui d’Andrei Bykov, plein d’amour et d’admiration pour son papa. Le hockeyeur du club de Fribourg-Gottéron aspire à suivre, voire à dépasser les traces de son paternel, Slava, sept fois champion du monde avec l’équipe nationale soviétique et le club CSKA Moscou avant d’intégrer l’équipe fribourgeoise, mais jamais champion de Suisse malgré son impressionnant parcours. En effet, ce grand joueur n’a pas réussi à décrocher le titre de champion de Suisse avec le HCFG et c’est donc Andrei qui s’est donné pour mission de remporter ce graal, pour marquer au fer rouge du nom des Bykov les Dragons de Gottéron et rendre son père fier de lui.
Il faut garder en tête que, quels que soient les chemins de vie, les affections et les désaffections familiales, c’est dans l’étoffe des pères que se tisse le costume des fils.
Au menu de «L'illustré-TV8» disponible dès ce mercredi 10 avril en kiosque:
- Catastrophe naturelle: Retour sur les huit avalanches de 1984 et celle du week-end de Pâques à Zermatt
- Energie: Des batteries suisses sans chimie installées en Chine
- Sport: Andrei Bykov sur les traces de son père, Slava, pour essayer de remporter le titre de champion de Suisse
- Couverture: Jean-Luc Bideau, un comédien libre qui se confie sur sa vie
- Bol de nature: A la recherche des fleurs d’avril
- Vécu: Parcours de résilience de Sébastien Maillard, brûlé à 92%
- Enquête: La disparition des clubs de rock en Suisse romande
- Economie: Gaspillage alimentaire, on peut encore progresser...