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Elisabeth II possède l’une des collections privées de bijoux les plus belles et les plus précieuses du monde. Revenons sur cinq pièces emblématiques.
Isabelle Cerboneschi
Elisabeth II possède l’une des collections privées de bijoux les plus belles et les plus précieuses du monde.
imago/i ImagesUn bijou peut être considéré comme un ornement, comme un investissement, comme un talisman, mais lorsqu’il est porté par la reine Elisabeth II, il devient un objet régalien et un symbole de pouvoir. Les joyaux de la couronne d’Angleterre, conservés dans la tour de Londres, au nombre de 140 – incluant des couverts et des vêtements –, sont un trésor d’Etat. La reine y a recours lors d’événements historiques, comme son couronnement le 2 juin 1953, pendant lequel elle portait la couronne impériale. Mais lors de dîners d’Etat ou de sorties officielles, la souveraine puise plutôt dans sa collection personnelle magnifiquement composée de pièces héritées, acquises, offertes ou encore transformées au fil des ans et toutes dûment répertoriées. Une collection qui compte parmi les plus riches du monde.
La reine possède une vingtaine de diadèmes de toute beauté, mais celui-ci a joué un rôle particulier dans sa vie: elle l’a porté – et abîmé – le jour de son mariage.
Comme dans toute union britannique qui se respecte, la mariée revêt «something old, something new, something borrowed, something blue» (quelque chose de vieux, de neuf, d’emprunté, de bleu). La chose empruntée fut donc ce diadème, un bijou de famille dans le vrai sens du terme. A l’origine, il s’agissait d’un collier à frange (fringe en anglais) commandé chez Collingwood & Co. par la reine Victoria et offert à Mary de Teck à l’occasion de son mariage avec le prince George, en 1893. Parce qu’elle aimait personnaliser ses bijoux, Mary avait demandé à Garrard, le joaillier de la couronne, de le transformer en un diadème formé de 47 barrettes serties de diamants, dans le style kokoshnik inspiré d’une coiffe russe traditionnelle, le mot signifiant crête. En 1936, elle l’a offert à sa belle-fille, la reine Elisabeth, qui l’a prêté à sa propre fille, la future Elisabeth II, le jour de ses noces.
Le diadème Queen Mary’s Fringe.
DRLe diadème Queen Mary’s Fringe.
DRLe diadème pouvait se transformer en collier mais la princesse l’ignorait et, le matin même de son union, elle fit une erreur de manipulation, abîmant le fermoir et déformant le bijou. Garrard a pu le réparer à temps… Par la suite, Elisabeth II l’a prêté à la princesse Anne lors de son union avec Mark Phillipps, puis à la princesse Beatrice, sa petite-fille, pour son mariage en 2020. Un véritable bijou dynastique.
Si la collection de la reine compte plus d’un millier de bijoux, l’une des pièces chères à son cœur est cette bague que lui a offerte Philip Mountbatten. Elle est ornée d’un solitaire de 3 carats issu d’un diadème ayant appartenu à la mère de Philip, la princesse Alice.
Dans un extrait d’un documentaire de la BBC, la princesse Elisabeth, rayonnante, montre sa bague de fiançailles peu de temps après la demande en mariage de Philip, à Balmoral, en 1946. Leurs fiançailles n’avaient toujours pas été rendues publiques.
BBCDans un extrait d’un documentaire de la BBC, la princesse Elisabeth, rayonnante, montre sa bague de fiançailles peu de temps après la demande en mariage de Philip, à Balmoral, en 1946. Leurs fiançailles n’avaient toujours pas été rendues publiques.
BBCUn bijou symbolique, dont la taille est inversement proportionnelle à l’attachement que lui porte la souveraine, qui a continué à la mettre bien après le décès de son époux, advenu le 9 avril 2021.
Si le collier Delhi Durbar évoque une Inde sous contrôle britannique, celui offert par le septième nizam (dirigeant d’Hyderabad), Osman Ali Khan, à la princesse Elisabeth à l’occasion de son mariage raconte une tout autre histoire. Le 15 août 1947, l’Inde indépendante naissait à minuit. Quelques mois plus tard, la future souveraine épousait le prince Philip. Le nizam avait donné des instructions au joaillier Cartier à Londres afin que la princesse puisse commander une parure dans leur collection. Le choix d’Elisabeth s’est porté sur un diadème, dont les motifs floraux pouvaient se détacher et se porter en broches, et sur un collier créé par Cartier en 1935, le collier Nizam of Hyderabad.
Le septième nizam, qui ne souhaitait pas que son Etat intègre l’Union indienne, a voulu parvenir à un compromis avec la couronne britannique et faire dépendre son royaume du Commonwealth. Espérait-il que son cadeau jouerait un rôle dans les négociations? La Grande-Bretagne n’a pas donné suite…
Photo réalisée par Yousuf Karsch en 1951 de la jeune Elisabeth portant le collier Nizam of Hyderabad. L’illustré utilisa cette image en couverture pour présenter la nouvelle reine à ses lecteurs en février 1952.
YOUSUF KARSH/Camera Press/ KeystPhoto réalisée par Yousuf Karsch en 1951 de la jeune Elisabeth portant le collier Nizam of Hyderabad. L’illustré utilisa cette image en couverture pour présenter la nouvelle reine à ses lecteurs en février 1952.
YOUSUF KARSH/Camera Press/ KeystDans les archives du palais Chowmahalla, l’ancienne résidence officielle du nizam, on peut découvrir une lettre de la princesse dans laquelle elle le remercie pour ce «magnifique et extravagant présent», lui disant combien elle le chérira jusqu’à la fin des temps.
Elisabeth II a fait démonter le diadème en 1973 et a utilisé les diamants en les combinant avec des rubis birmans pour en faire la Burmese Ruby Tiara, dessinée par Garrard. Quant aux trois broches détachables du diadème d’origine, la reine les porte encore aujourd’hui.
La reine Mary a transmis de nombreux joyaux à Elisabeth II, dont celui-ci, orné d’émeraudes de Cambridge et d’un diamant issu du fameux Cullinan. Ce bijou d’une étonnante modernité avait été commandé par Mary à Garrard en 1911. Elle l’a porté lors du durbar de Delhi du 12 décembre de la même année, qui célébrait le couronnement quelques mois plus tôt du roi George V. Ce collier est formé d’une alternance de diamants, de huit émeraudes de Cambridge appartenant à la famille de la reine Mary, ainsi que d’une paire de pendentifs asymétriques.
Le collier Delhi Durbar.
DRLe collier Delhi Durbar.
DRLe premier est une émeraude cabochon, le deuxième n’est autre que le Cullinan VII de 8,8 carats. Ce dernier est issu du fameux diamant Cullinan de 3105 carats offert au roi Edouard VII en 1907 et qui avait été taillé en neuf gros diamants. A sa mort, en 1953, la reine Mary a légué la quasi-totalité de la parure Delhi Durbar à sa petite-fille, la reine Elisabeth II.
S’il est des bijoux que la reine affectionne particulièrement et porte lors de quasiment toutes ses sorties officielles, ce sont ses broches.
La reine affectionne particulièrement les broches et en porte lors de quasiment toutes ses sorties officielles.
IMAGO/Pool / i-ImagesLa reine affectionne particulièrement les broches et en porte lors de quasiment toutes ses sorties officielles.
IMAGO/Pool / i-ImagesElle les porte accrochées sur l’épaule gauche d’une robe ou de l’un de ses fameux manteaux monochromes. Sur les dernières photographies officielles prises en janvier 2022 au château de Windsor dans la salle du Chêne, on la voit arborant un jeu de deux clips sertis de diamants et d’aigues-marines.
Elle porte ses broches accrochées sur l’épaule gauche d’une robe ou de l’un de ses fameux manteaux monochromes.
DRElle porte ses broches accrochées sur l’épaule gauche d’une robe ou de l’un de ses fameux manteaux monochromes.
DRIls lui ont été offerts par son père, le roi George VI. Il les avait commandés à Boucheron pour le 18e anniversaire de la princesse, le 21 avril 1944. Ce bijou transformable peut se porter en broche simple ou en deux clips séparés. Outre l’aspect sentimental de ces broches, elles n’ont pas été photographiées ce jour-là par hasard: Elisabeth II les a portées tout au long de son règne.
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Un peuple au rendez-vous: le couronnement, qui a coûté quelque 53 millions d’aujourd’hui, a passionné les Britanniques: 3 millions d’entre eux étaient dans les rues, 27 millions ont regardé la cérémonie à la télévision en noir et blanc et 11 millions l’ont écoutée à la radio, soit 40% de la population. Quelque 2000 journalistes et 500 photographes ont couvert l’événement vu par 300 millions de téléspectateurs dans le monde.
DRUn mari soumis à sa femme couronnée: comme le veut la tradition, à laquelle il a vainement tenté de s’opposer, le duc d’Edimbourg, mari de la reine, s’agenouille devant elle en signe d’allégeance. Il prend les mains de son épouse et dit: «Moi, Philip, je deviens votre fidèle homme lige ma vie durant», puis jure de se soumettre «avec l’aide de Dieu», avant d’embrasser la joue gauche de la souveraine.
Getty ImagesUn roi... sans couronne: Edouard VIII a abdiqué le 10 décembre 1936. La raison invoquée fut son mariage avec l’Américaine, et divorcée, Wallis Simpson (à g.). En fait, sa proximité avec les dignitaires nazis ne lui aurait pas permis de régner et le gouvernement l’aurait invité à se retirer. Le couple regarde le couronnement sur l’écran de télévision de la maison parisienne de Margaret Biddle (à dr.), une millionnaire américaine.
Alamy Stock PhotoSourire éclatant au balcon de Buckingham: le 2 juin 1953, la reine apparaît enfin couronnée au balcon du palais de Buckingham. Elle sourit, pleinement épanouie, aux côtés de son mari et de leurs deux enfants, le prince Charles et la princesse Anne, qui saluent la foule. Elle est le 40e souverain à accéder officiellement à cette position sacerdotale mais ignore alors qu’elle va régner durant 70 ans, un record pour la monarchie britannique.
imago/United Archives InternatioCharles s’ennuie: le prince Charles, 4 ans et demi, montre peu d’enthousiasme, entre sa tante, la princesse Margaret (à dr.), et sa grand-mère, la reine mère Elizabeth. Tous trois assistent, comme 7340 invités, au couronnement. Ils sont dans la Royal Box, tribune couverte, située à une dizaine de mètres du cœur de la cérémonie.
DRLa robe de couronnement: la reine portait une robe de soie blanche signée Norman Hartnell, qui avait soumis neuf dessins différents à Sa Majesté. Elle fit ajouter aux broderies différents emblèmes floraux du Royaume-Uni, la rose pour l’Angleterre, le chardon pour l’Ecosse, le trèfle pour l’Irlande, plus ceux des nations du Commonwealth, dont la feuille d’érable pour le Canada, la fougère pour la Nouvelle-Zélande, la fleur de lotus pour Ceylan (aujourd’hui Sri Lanka). La reine sera surprise par un discret détail, soit un minuscule trèfle à quatre feuilles, brodé par les couturières, en guise de porte-bonheur.
CAMERA PRESS/Cecil BeatonLa couronne d’Etat impériale: lors de la cérémonie, Elisabeth II est coiffée de deux couronnes. Celle de Saint-Edouard, symbole de l’autorité royale, est en or massif et pèse environ 2,2 kg. La reine va ensuite coiffer la couronne d’Etat impériale, dite d’apparat, pour les photos officielles. Elle est constituée de joyaux historiques, dont le rubis du Prince noir, pierre semi-précieuse que le roi de Castille, dit Pedro le Cruel, aurait donnée à Edouard, dit le Prince noir, en 1367 pour l’avoir aidé à vaincre un rival.
DRUn diamant hors norme: le sceptre à la croix, symbole du pouvoir de la royauté et de la justice, est reçu par la reine en fin d’investiture, avant son couronnement. George V avait fait ajouter le diamant Cullinan I, appelé aussi Grande Etoile d’Afrique. C’est le plus gros diamant blanc taillé de qualité supérieure du monde. Il pèse 530,2 carats. L’autre sceptre du monarque est appelé sceptre à la colombe. Il est surmonté d’un volatile en émail aux ailes déployées, perché sur une croix symbolisant le Saint-Esprit et la miséricorde.
DRL’anneau à la main droite: l’anneau de mariage d’Angleterre, placé à l’annulaire droit, fut fabriqué pour le couronnement de Guillaume IV, en 1831. Cette pièce en or porte en son centre un saphir octogonal incrusté de quatre rubis rectangulaires et d’un carré formant une croix bordée de 14 diamants. Il a été porté à chaque couronnement depuis plus de deux cents ans, à l’exception de la reine Victoria, dont les doigts étaient trop fins.
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