Au classement officieux des couples de sportifs suisses les plus renommés, cette paire-là fait exploser tous les scores. Enfin! Parce qu’un tandem formé de la skieuse la plus instinctive et la plus pétillante de l’histoire du ski suisse et du pilier moral de l’équipe de Suisse de football depuis quatre Coupes du monde, c’est du lourd, comme on dit trivialement aujourd’hui.
Depuis ce printemps et leurs premiers aveux – sur internet bien sûr – Lara Gut et Valon Behrami ont enfin apporté ce qui manquait cruellement à la Suisse: du glamour de proximité, de l’amour 100% fédéral, une passion indigène, plus exactement tessinoise.
Hormis les Federer, qui, après tant d’années et quatre enfants, forment désormais surtout un couple exemplaire à qui tout réussit, la Suisse amoureuse et célèbre, c’était le désert de Gobi.
Mais cet inattendu et improbable duo entre la skieuse de génie et le sacrificiel demi-défensif allait se révéler proche de la perfection sur le plan médiatique. Après quelques apparitions ensemble en guise d’amuse-bouche, les voici en effet partis pour une campagne de Russie riche en embrassades de félicitation et, finalement hélas, de consolation. Lara Gut et son héros auront ainsi ajouté un bonus d’humanité à cette compétition, même si celle-ci s’est terminée une nouvelle fois sur une défaite frustrante pour la Nati et ses fans.
Grâce à nos deux champions et à Cupidon, on allait vite oublier ces maudits huitièmes de finale: à peine rentrés de Russie, le couple se marie, prenant à contrepied toute la nation. Cinq mois seulement après avoir annoncé sa séparation d’avec la belle Bergamasque Elena Bonzanni, 35 ans, sa compagne depuis douze ans et la mère de ses deux filles, Sofia (9 ans) et Isabel (19 mois), Valon passe, dans la foulée la bague au doigt à la merveille du ski suisse.
Et là encore, il faut s’en remettre à eux-mêmes et à leurs comptes Instagram pour savourer quelques miettes informatives de leur romance: c’est une photo du couple de dos, prise sur la terrasse du restaurant Vetta, au sommet du Monte Brè sur les hauts de Lugano, qui confirme que le mariage a bien eu lieu dans des costumes et un décor que ne renierait pas une telenovela à gros budget.
Comment expliquer qu’entre la vraie petite blonde toujours pimpante et le faux blond constellé de tatouages, cela jouerait de manière aussi sublime, au point qu’il faut déjà se demander s’il faudra suivre, cet hiver, les performances non plus de Lara Gut mais de Lara Behrami? Les images du couple, début juin dans le paddock du Grand Prix de formule électrique de Zurich, leur première apparition commune en public, avaient surtout permis de mesurer la timidité du Tessinois et la décontraction proverbiale de sa future épouse. Caché derrière des lunettes de soleil, vêtu comme un teenager et ne pipant mot, Valon donnait l’impression d’être coaché par sa nouvelle compagne dont le caractère extraverti est bien connu. Ces premiers pas étaient trompeurs. Deux mois plus tard, les deux champions forment un couple arborant un même sourire éclatant.
La douche froide
Il a fallu l’Association suisse de football et le coach de l’équipe de Suisse pour jouer les trouble-fêtes. Il y a dix jours, Vladimir Petkovic appelle son joueur aux quatre Coupes du monde pour lui signifier qu’il n’est plus le bienvenu dans l’équipe. Behrami prend très mal ce qu’il considère comme un manque de gratitude et de savoir-vivre. Son épouse le soutient mais affirme que, amoureux comme ils le sont, ils sont prêts à affronter toutes les contrariétés.
Une gestion délicate
Mais le football est loin de se terminer avec l’équipe nationale pour Valon qui, à 33 ans, peut espérer passer encore une ou deux belles années dans le Calcio, où il est de retour. Il doit désormais se concentrer sur sa saison avec le club italien d’Udine où il a été transféré par Watford. Pour le couple de jeunes mariés, qui a décidé de vivre à Lugano, il va donc falloir gérer les contraintes de leur vie sportive respective. Car pas question non plus pour Lara de ranger les lattes: «Quand une athlète, une fille, se marie, la première chose, c’est: «Elle va arrêter sa carrière.» Je crois que rencontrer l’amour de sa vie me donne seulement de la force, à moi. Depuis que j’ai Valon dans ma vie, j’arrive à partager les choses, j’ai une personne de plus qui m’aide et qui me comprend. Franchement, je crois simplement que je vais réussir à vivre ma carrière de manière encore plus épanouie et intense – mais heureuse. Mon ambition, c’est surtout de réussir à gagner avec le sourire, mais avec un sourire qui vient du cœur», affirmait-elle récemment dans une interview.
Qui vivra verra. Mais quand on a réussi, comme Lara, à gagner 24 épreuves de Coupe du monde ou quand on a signé l’exploit d’éteindre Neymar pendant tout un match comme l’a fait Valon face au Brésil, on est bien armé pour déjouer les difficultés de deux vies aux contraintes hors normes.
Leurs faits d’armes et leurs faiblesses
Lara Gut
Née le 27 avril 1991 (27 ans)
A Sorengo (Ti)
Premier grand succès
Le 20 décembre 2008, à 17 ans, elle signe la première de ses 24 victoires en Coupe du monde, lors d’un super-G à Saint-Moritz.
Son plus grand exploit
Elle remporte le classement général de la Coupe du monde 2015-2016, vingt et un ans après Vreni Schneider.
Ses regrets
Absente des Jeux de Vancouver en 2010 à cause d’une luxation de la hanche, elle décroche le bronze de la descente quatre ans plus tard à Sotchi. Cela reste sa seule médaille olympique. Car en Corée ce printemps, elle sort en descente et en géant, finit quatrième en super-G, avant de se blesser lors du combiné. Sera-t-elle encore en lice, à 31 ans, pour les Jeux de Pékin en 2022?
Valon Behrami
Né le 19 avril 1985 (33 ans)
A Mitrovica (ex-yougoslavie)
Début de notoriété
C’est en 2003 que son nom commence à être cité dans les rubriques sportives. On se demande qui est ce Tessinois de 18 ans qui joue en Serie B italienne, à Gênes puis à Vérone. Son talent convainc en 2005 la Lazio Roma de l’engager. Il restera quatre ans dans la capitale italienne, puis jouera à West Ham, à la Fiorentina, à Naples, à Hambourg, à Watford et désormais à Udine.
Son plus grand exploit
Il est le seul footballeur suisse à avoir participé à quatre Coupes du monde (2006, 2010, 2014, 2018).
Son point faible
Demi-défensif n’est pas un poste de buteur, mais le Tessinois marque quand même très peu: 14 fois en 410 matchs de club. Et deux fois en 83 sélections en équipe de Suisse.