«J’ai 24 ans et je vais présenter ma collection de diplôme lors du défilé qui marque la fin de mes études au Central Saint Martins College de Londres, la prestigieuse école d’où sont sortis Stella McCartney et John Galliano. J’ai passé trois ans dans cette école et je sais que mes parents seront dans la salle, avec ma grand-mère, mon frère, c’est un grand jour. Ils m’ont fait confiance en me laissant partir à Londres, même si c’était un vrai saut dans l’inconnu pour eux car j’ai été élevé en Valais, loin de ce milieu de la haute couture. Mais je touche mon rêve du bout des doigts, j’ai eu la chance d’être pris parmi les 30 élèves sur 360 qui vont voir leur création défiler dans ce show. Ma mère ne le sait pas encore, mais j’ai choisi «Envole-moi» la chanson de son chanteur préféré, Jean-Jacques Goldman, pour mon défilé; elle adorait cette chanson à 20 ans et voir son fils qui la passe vingt-deux ans plus tard, c’est comme une boucle qui se boucle. Elle a été tellement émue qu’elle a pleuré pendant tout le show, mais ce qui m’a touché particulièrement, c’est la fierté de mon papa, lui-même très ému par le fait de voir sa femme aussi bouleversée; il avait les larmes aux yeux.
J’ai encore les frissons en me souvenant de ce qu’il m’a dit ce jour-là: «Tu vois, Kévin, je ne comprends pas forcément tout ce que tu fais quand tu crées des vêtements, mais je comprends pourquoi tu fais ça, je comprends que tu es bon dans ce que tu réalises et que tu réussis à faire vivre avec tes créations des émotions incroyables à ta mère mais aussi au public qui assiste à ton défilé.» De l’entendre me dire ça, quel cadeau formidable, car pendant toutes ces années loin des miens, je n’avais pas souvent eu l’occasion d’échanger autour de mon travail. C’était comme des retrouvailles. C’est d’ailleurs mon père qui m’avait fourni des vieilles couvertures de l’armée, car pendant ces études je m’étais rendu compte qu’en achetant des pièces vintage, de vieux draps, des couvertures, j’arrivais à réaliser mes projets à faible coût; c’est comme ça que j’ai commencé mon voyage vers l’upcycling. Du coup, en ce jour si important pour moi, je pouvais aussi enfin prouver à mes parents que devenir styliste n’était pas juste un caprice de gamin, j’avais décroché un CDD chez Louis Vuitton grâce à cette collection de bachelor!
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J’avais eu raison de tout sacrifier pour ça. Cette collection est toujours dans l’armoire de ma grand-maman Simone, qui tricote toujours pour Germanier. Vous savez, c’est très important de le préciser, ma marque, ce n’est pas Kévin Germanier, mais Germanier, parce que c’est une histoire de famille! Mes parents travaillent dans l’entreprise, ma mère viendra avec moi à la Fashion Week de Dubaï pour présenter ma nouvelle collection. Ils étaient bien sûr à mes côtés pour celle de Paris, qui vient de se terminer et a occupé tout mon temps ces dernières semaines. Et puis, il s’est passé aussi récemment quelque chose d’extraordinaire: je suis devenu tonton le 7 juillet dernier d’un petit Mathieu, le fils de ma sœur. Ça me booste terriblement!»
Son actualité
Kévin Germanier s’envolera pour Dubaï fin octobre où il présentera pour la première fois sa nouvelle collection à la Fashion Week des Emirats arabes. Toujours fidèle à ses fondamentaux: une mode éthique mais glamour et colorée, avec paillettes, sequins et cristaux Swarovski.