Les employeurs privés n'ont pas le droit de surveiller la sphère intime de leurs employé·es. La question se pose néanmoins: quelle est l’étendue de sphère intime qui subsiste au travail? Ou en télétravail? Cet article répond aux questions les plus importantes.
Ma hiérarchie a-t-elle le droit de:
- Me licencier sur la base de photos festives?
- Mettre mon téléphone sur écoute?
- Consulter mes courriers électroniques?
- Me filmer sur mon lieu de travail?
- Fouiller mes poches?
- Me surveiller au moyen du GPS de la voiture de service?
- Me contacter 24 heures sur 24?
- Me surveiller lorsque je suis en télétravail?
1) Me licencier sur la base de photos festives?
Le comportement durant le temps libre et le travail sont strictement distincts. Il ne peut rien vous arriver au travail en raison de photos festives. Dans des circonstances particulières, vous devez néanmoins vous attendre à un licenciement. Par exemple si vous prétendez être alité en raison d’une maladie sévère et qu’au lieu de cela vous écumez les bars de la ville. Il faudrait toutefois que vous vous absentiez régulièrement sans raison valable pour détruire irrémédiablement la relation de confiance et recevoir un licenciement immédiat.
A propos: si vous êtes en incapacité de travail en raison d’une fracture de la main, vous pouvez tout de même participer à la vie sociale.
2) Mettre mon téléphone sur écoute?
En principe, les écoutes téléphoniques sont interdites. Sauf si les conversations comportent des réservations ou des commandes. Pour être autorisées, les écoutes à fin de contrôle de performance ou de formation nécessitent l’accord de toutes les personnes participant à la conversation. Votre hiérarchie n’a pas non plus le droit d’écouter les conversations téléphoniques que vous effectuez depuis votre portable professionnel, ni de les enregistrer, ni de lire vos sms.
Si vous soupçonnez que la personne qui vous emploie vous espionne, défendez-vous. La protection des données sensibles des personnes employées est un droit important de la législation suisse.
3) Consulter mes courriers électroniques?
Oui, pour autant qu’il s’agisse de courriers électroniques professionnels. En tant que correspondance professionnelle, ils appartiennent à l’employeur. Celui-ci n’a en revanche pas le droit de prendre connaissance de vos e-mails privés. Avant un changement d’emploi, vous devriez avoir suffisamment de temps pour effacer vos e-mails privés.
Au demeurant, la personne qui vous emploie peut consulter vos courriers électroniques pour deux raisons. La première: si elle a besoin d’y accéder, par exemple parce que vous êtes absent·e en raison d’une maladie. La seconde: pour contrôler si le règlement informatique est respecté.
4) Me filmer sur mon lieu de travail?
En principe, votre hiérarchie n’a pas le droit d’utiliser des moyens techniques pour contrôler les performances et le comportement des personnes qu’elle emploie. Une caméra est autorisée uniquement pour la sécurité de personnes ou la protection d’objets. Par exemple dans un supermarché, pour éviter les vols.
Votre employeur doit vous informer au préalable à ce sujet. Il doit en outre vous indiquer précisément où et quand les images seront filmées et combien de temps elles seront conservées. Il n’est pas autorisé à diriger la caméra directement sur vous.
5) Fouiller mes poches?
Les personnes employées ont droit au respect de leur sphère privée. C’est pourquoi l’employeur a besoin de votre consentement explicite pour fouiller votre sac à main, votre tiroir ou vos armoires. Souvent, les contrats de travail des grandes entreprises comportent des clauses à ce sujet. Dans ce cas, vous acceptez le contrôle par votre signature.
Il doit en outre exister une raison valable pour justifier le contrôle. Par exemple lorsque l’on soupçonne que des biens de l’entreprise ont été volés. Dans ce cas, toutes les personnes employées doivent être contrôlées de la même façon.
6) Me surveiller au moyen du GPS de la voiture de service?
De même que les caméras, les GPS ne peuvent pas être utilisés pour surveiller le comportement des personnes employées sur leur lieu de travail. Sauf pour vérifier si les horaires de travail sont respectés et pour prévenir une utilisation non prévue du véhicule. Votre hiérarchie doit alors impérativement vous informer qu’elle utilise le GPS.
De nombreuses personnes utilisent également les véhicules de service à titre privé. La localisation par GPS hors des heures de travail constitue une grave atteinte à la sphère privée des personnes employées et n’est généralement pas justifiée.
7) Me contacter 24 heures sur 24?
Une fois vos heures de travail convenues accomplies, vous n’avez plus l’obligation d’être joignable par votre hiérarchie. La loi sur le travail prescrit une durée maximale de travail, des pauses ainsi que le droit à des vacances sans dérangement.
Si votre hiérarchie exige toutefois que vous soyez davantage joignable, vous devez être indemnisé·e pour cela. Soit par du temps libre de même durée, soit par le salaire contractuel augmenté de 25% pour l’indemnisation des heures supplémentaires.
8) Me surveiller lorsque je suis en télétravail?
La demande de logiciels de surveillance a augmenté de 58% depuis le début de la pandémie de covid. C’est ce que révèle une analyse de la plateforme Top10VPN qui a analysé les services VPN dans le monde entier. De tels programmes de surveillance peuvent par exemple surveiller l’écran, enregistrer les mots saisis ou garder un trace des recherches internet et de l’historique des courriers électroniques. Ou même surveiller l’image de la caméra et le son.
Mais, ici encore, il est interdit d’installer des systèmes de contrôle techniques pour surveiller le comportement des personnes employées sur leur lieu de travail. Les données collectées sur les personnes employées peuvent être analysées uniquement de manière anonymisée – par exemple pour déterminer combien de temps est consacré à Facebook dans l’ensemble de entreprise.
*Traduit de l'allemand (Beobachter)