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Musique et photo

Joseph Carlucci, un photographe très rock!

Le Romand Joseph Carlucci a immortalisé tous les plus grands du rock. Les membres de Metallica, encore ados, lui avaient même demandé d’envoyer les photos à leurs parents aux Etats-Unis.

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Joseph Carlucci

Le photographe Joseph Carlucci pose avec son livre "45 Years of Rock Photography" dans son atelier le mercredi 29 septembre 2021 a Lausanne.

JEAN-CHRISTOPHE BOTT

«A l’adolescence, j’aimais tellement le rock que j’allais à l’école avec des quarante-cinq tours dans le cartable en écoutant Paranoid, de Black Sabbath, sur mon mange-disque. Mon premier concert a été Uriah Heep, groupe de métal progressif, le 20 août 1974 à Berne. Le lendemain, j’essayais de transmettre mon éblouissement aux copains qui refusaient de m’accompagner. L’idée m’est alors venue de capturer ces instants magiques en photo afin de les partager. En parfait autodidacte, j’ai commencé avec un Kodak Instamatic.

Après les shows, le plus souvent en Suisse alémanique, je dormais à la gare de Zurich ou de Berne, avant de rejoindre l’usine de glaces Lusso, où j’étais responsable des machines. Tout devait être prêt avant 8 heures. Et, afin d’allier ma passion musicale à la ponctualité au travail, j’étais abonné aux nuits blanches.

Chemin faisant, je me suis rapproché de la scène afin d’être au plus près de l’action. J’ai vu Deep Purple, les Who, Status Quo, Genesis, Queen, les Stones et Pink Floyd. Le 3 février 1977, j’étais si heureux d’aller enfin écouter Black Sabbath à Thônex (GE) que j’en ai négligé le groupe d’ouverture: AC/DC, encore méconnu. Préférant aller manger une pizza, je n’ai vu que leur dernier rappel. Angus Young, sur le dos, exécutait un solo de guitare hallucinant. Ironie de l’histoire, des années plus tard, alors que j’étais passé professionnel, l’un de mes clichés a illustré la pochette de l’un de leurs singles.

A cette époque bénie, sans fouille à l’entrée, on pouvait aller discuter avec les musiciens et leur demander un autographe. J’ai 65 ans: le selfie n’existait pas encore.

Joseph Carlucci

Mon premier livre: le titre de l’ouvrage de Carlucci dit ceci: «Hey Joseph, où est ma p... de photo?» David Bowie, l’auteur de la note, s’étonnait, avec malice, de ne pas voir sa bobine affichée en Suisse dans l’échoppe du photographe. Le reste est à découvrir en 276 pages et 370 clichés. Un must.

DR

A force de voir mon visage, mon nom a circulé dans le milieu et, dans les années 1980, Ursula Rohr, de Disctrade, m’a appelé pour faire des photos de musiciens américains de 18 ans. Ils jouaient pour la première fois en Suisse: c’était Metallica, l’un des futurs plus grands groupes de tous les temps. James Hetfield (chant, guitare) et Lars Ulrich (batterie), les jeunes fondateurs, m’attendaient à Zurich avec leurs acolytes. On a plaisanté, c’était bon enfant. Deux jours après, j’ai pu les rejoindre à Milan, puis en Belgique. Ils étaient si contents qu’ils m’ont demandé d’envoyer mes photos à leurs parents. En retour, j’ai reçu une lettre de remerciement de Lars, que je publie dans mon livre. Bien plus tard, devenus d’énormes stars, lorsqu’ils ont réédité en coffret l’album Ride The Lightening, ils ont cherché des photos de leurs débuts. J’en ai proposé 50, ils en ont retenu et publié 45. Plus 25 autres pour Master of Puppets. Une énorme surprise pour moi.

J’ai des souvenirs tout aussi forts liés à Iron Maiden. J’avais fait reproduire la pochette de leur second disque, Killers, sur le capot de ma Ford Capri. En la voyant, un roadie m’a invité à l’hôtel afin de la montrer au groupe. Depuis, on est restés copains. Avec mon ami Bobby Leiser, j’ai même séjourné, à Londres, au domicile de leur batteur, Nicko McBrain. Il m’a fait une courte vidéo (voir mon site) à l’occasion de la sortie de mon ouvrage retraçant mes 45 ans de carrière. Dans ces moments privés, je range mon appareil. Ces images-là, rien que pour mes yeux, sont à jamais gravées dans mon cœur.»

Voir ses archives et son travail: www.joseph-carlucci.com

Par Didier Dana publié le 22 octobre 2021 - 13:51