- Stéphane Benoit-Godet: Qu’est-ce que c’est, aujourd’hui, le bénévolat? Comment a-t-il évolué?
- Jean-Marc Richard: Il y a cinquante ans, en caricaturant, le bénévolat était encore une activité pour dames patronnesses. Et, au fil des ans, des personnalités engagées, comme Mère Sofia, à Lausanne, ont contribué à faire évoluer l’image du bénévolat. Très lié aux Eglises à l’époque, celui-ci s’est ouvert de nouveaux horizons, s’est modernisé. On dit d’ailleurs aujourd’hui «je m’engage» au lieu de dire «je fais du bénévolat». C’est devenu une fierté, alors que, avant, une activité bénévole était justifiée en partie par un sentiment de devoir, parfois même par un sentiment de culpabilité. Aujourd’hui, les jeunes s’engagent plus que jamais dans le monde associatif, dans des démarches de bénévolat, car il y a une fierté de s’engager.
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- Les milieux privés, les entreprises, jouent-ils un rôle toujours plus important dans le bénévolat?
- Jean-Marc Richard: C’est certain. Mais je constate aussi que le bénévolat a pris en charge des tâches que l’Etat assure de moins en moins aujourd’hui, ce qui me préoccupe.
- Mirko Mandola: Je pense qu’il est important de se demander ce que le privé peut amener de positif et d’utile à la société. Il y a notamment un grand besoin de coordination entre les associations et les démarches individuelles. C’est pour cette raison qu’UBS a créé sur internet la plateforme numérique UBS Helpetica afin de motiver des vocations et de soutenir des projets sur le long terme. Cette plateforme, cet écosystème digital renforce la visibilité des associations qui manquent parfois de ressources pour se faire connaître. Plus de 230 projets ont déjà été présentés et analysés par un comité de spécialistes. Et 160 d’entre eux ont été mis en œuvre. Depuis plus de quinze ans, UBS a également développé un programme de bénévolat interne, un engagement qui est une vraie fierté pour notre banque. Les collaboratrices et collaborateurs ont la possibilité de s’engager deux jours par année, voire quatre jours durant la pandémie. En 2019, avant la pandémie, 5000 employés, soit un cinquième d’UBS Suisse, ont participé volontairement à ce programme.
>> Visiter la plateforme UBS Helpetica
La solidarité à Neuchâtel à la Table ronde du Café du Coin
- Monsieur Aguet, votre engagement bénévole consiste justement à aider les associations. Vous confirmez que les démarches bénévoles ont besoin de soutien, aussi bien privé que public?
- Marcel Aguet: Ce que je constate, aujourd’hui, c’est que les associations qu’on accompagne ont des difficultés de gouvernance. Elles n’ont pas intégré suffisamment la charge des responsabilités, des exigences stratégiques et opérationnelles qu’elles doivent porter. On ne peut plus être amateur quand on compte 300 membres, par exemple. Et puis, les bénévoles qui s’engagent le font un peu avec de la réserve. Ils ne participent pas suffisamment à la dynamique de leur association. Notre association les aide donc à définir une stratégie et à renforcer leur efficacité. Même une grande ONG comme Terre des hommes a fait appel à nous quand elle a dû se restructurer.
- Ces deux dernières années, dans quelle mesure la crise sanitaire a-t-elle compliqué les choses pour le monde associatif et le bénévolat?
- Marcel Aguet: L’impact de la crise est important. Nous organisons par exemple des speed meetings pour aider les associations bénévoles à trouver des membres. D’habitude, 120 personnes se présentaient. Cette année, ils n’étaient que 20.
- Jean-Marc Richard: Cette crise recentre, je crois, la solidarité en Suisse, comme le confirment les 43 millions de francs collectés par la Chaîne du bonheur, un résultat sans précédent. Et puis le covid a à la fois motivé des gens mais en a aussi freiné d’autres. Trouver de nouveaux bénévoles est plus difficile que jamais, comme j’ai pu le constater avec la vente d’oranges pour Terre des hommes. C’est pour cela que, à la radio, nous faisons le maximum afin d’encourager des vocations. Plus que jamais, les associations doivent rappeler qu’elles existent. Un autre problème: beaucoup d’associations font au fond la même chose. Des parents qui ont un enfant souffrant d’un cancer ressentent par exemple le besoin – très compréhensible par ailleurs – de créer une association.
- Mirko Mandola: C’est justement l’ambition de notre plateforme UBS Helpetica: permettre à des projets d’utilité publique de bénéficier d’une visibilité élevée auprès de toute la population suisse. UBS Helpetica s’adresse à la fois à l’ensemble des institutions caritatives en Suisse mais aussi au grand public. Elle leur donne la possibilité de soumettre des idées de bénévolat en lien avec la durabilité ou de faire connaître leurs projets à des personnes désireuses de s’engager. Les projets soumis doivent correspondre à l’une des quatre thématiques: formation, domaine social, entrepreneuriat et environnement.
- Laure Galvani: Il y a eu une baisse du nombre de vocations avec cette crise sanitaire, mais j’ai constaté un effet positif: les gens qui s’engagent quand même sont plus réalistes qu’avant. Ils savent précisément ce qu’ils peuvent apporter, notamment en termes de temps disponible.
- Le bénévolat, est-ce une vocation liée à sa personnalité ou s’engage-t-on au gré des circonstances de la vie, presque par hasard?
- Laure Galvani: C’est amusant: j’ai pris conscience que j’étais bénévole de l’Association neuchâteloise pour les proches aidants seulement quand vous m’avez proposé de participer à cette table ronde! Peut-être parce que je suis bénévole depuis longtemps et que j’ai cette fibre en moi. A chaque fois que je m’engage dans une action, je me retrouve d’ailleurs présidente après deux ou trois ans. Ce qui me motive le plus, c’est de trouver des moyens de développer l’association, comment en être le comprimé effervescent en quelque sorte.
- Marianne Guillaume-Gentil: Personnellement, j’ai fait beaucoup de politique et j’ai pris ma retraite comme infirmière l’année passée. Je me suis alors engagée en tant que bénévole au Dispensaire des rues de Neuchâtel, qui compte trois infirmières salariées et 35 bénévoles. Chacun a ses propres motivations, en fonction de sa situation.
- Malgré le bénévolat, toute association a bien sûr besoin de financement. Les associations sont-elles suffisamment efficaces pour la recherche de fonds?
- Marcel Aguet: Les associations nous approchent souvent pour être conseillées dans la recherche de fonds. C’est un problème complexe. Il existe d’ailleurs un cursus pour se former au fundraising. C’est capital d’acquérir ces compétences, car la philanthropie a beaucoup changé au fil des années. Aujourd’hui, il y a 3500 fondations rien qu’en Suisse romande. Et aucune d’entre elles ne donne d’argent sans connaître très précisément la nature du projet. Il faudrait aussi que les bénévoles comprennent que le financement doit d’abord permettre aux associations de rester pérennes. Il faut pour cela rester réaliste sur le plan budgétaire. J’ai l’exemple d’une association qui avait un budget mensuel de 10 000 francs. Nous leur avons dit que c’était excessif et qu’il fallait diviser par deux leurs frais fixes. Elle n’a pas voulu nous écouter et elle a disparu.
- Laure Galvani: A un moment, on s’est rendu compte que notre association de proches aidants plafonnait. Où pouvait-on trouver un financement pour développer l’association et lui donner un second souffle? Nous avons commencé par solliciter la Loterie romande, comme tout le monde. Mais la rencontre avec Marcel Aguet et son association nous a ouvert d’autres perspectives. Il faut avoir le réflexe de se faire conseiller dans la recherche de fonds.
- Marianne Guillaume-Gentil: De notre côté, le Dispensaire des rues de Neuchâtel ne reçoit aucune subvention. Le dispensaire vit de dons privés. Et, en plus de cette générosité, les loyers des appartements du bâtiment qui l’abrite permettent de payer les trois infirmières.
- Jean-Marc Richard: L’enjeu fondamental derrière cette problématique du financement, c’est en effet de pouvoir assurer la durabilité d’une structure. Je constate et déplore en l’occurrence le désengagement de l’Etat, qui a tendance à couper dans ses prestations. C’est un paradoxe douloureux du bénévolat: les associations qui n’emploient pas de salariés ne reçoivent plus d’argent parce qu’il n’y a pas de postes de travail à sauver. Or Caritas, par exemple, a pu faire un travail de terrain que l’Etat n’aurait jamais pu faire. Et c’est avec l’argent de la Chaîne du bonheur qu’elle a pu répondre aux demandes massives à la suite de la pandémie.
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- L’entraide entre associations bénévoles est-elle perfectible?
- Laure Galvani: Oui. Il faut beaucoup plus travailler en réseau et moins en silo. La problématique des proches aidants, par exemple, est une thématique transversale, qui ne peut pas être rattachée uniquement à la santé publique. J’ajoute que si l’Etat était un bon partenaire, il devrait faire un référencement plus pointu des associations afin de mieux savoir ce que fait exactement chacune d’elles. Ce serait précieux pour favoriser des collaborations.
- Jean-Marc Richard: Pour favoriser ce travail en réseau, les médias ont un rôle important à jouer pour mieux faire connaître les associations.
- Mirko Mandola: UBS Helpetica publie des témoignages de ce qui se fait dans les associations qui sont inscrites sur la plateforme. C’est une manière efficace de susciter des échanges entre les différentes actions et de favoriser des synergies.
>> Découvrez UBS Helpetica Le réseau de bénévoles pour plus de durabilité
- Que dire encore pour encourager des vocations de bénévoles?
- Marianne Guillaume-Gentil: Il est important de faire savoir que le bénévolat, c’est faire du bien, certes, mais c’est aussi se faire du bien à soi. Cela va dans les deux sens. Il faut promouvoir cette démarche de manière positive et attractive.
- Mirko Mandola: Je peux confirmer, au travers des expériences de nos collaboratrices et collaborateurs qui participent à notre programme de volontariat, que le bénévolat est très valorisant. Beaucoup d’entre eux s’engagent dans leur domaine de compétence, par exemple pour apprendre aux jeunes à gérer leur budget. Et c’est aussi apprécié par notre clientèle, qui attend de plus en plus ce type d’engagement de notre part.
- Laure Galvani: Ce temps consacré au bénévolat, c’est un partage enrichissant. C’est vivre avec d’autres une action positive.
- Jean-Marc Richard: Durant cette table ronde, nous avons répété à quel point il est précieux de mieux faire connaître les démarches bénévoles. Alors incitons des informaticiens à aider bénévolement les associations pour leur faire de meilleurs sites internet!
«Intense activité de recherche et développement»
Dans le cadre de la table ronde de «L’illustré» et de la «Schweizer Illustrierte», l’indicateur de compétitivité d’UBS publié à la fin d’août met en lumière chaque canton que nous visitons. Aujourd’hui, le canton de Neuchâtel.
La capacité d’innovation est la vitrine du canton de Neuchâtel. Sa longue tradition dans l’industrie horlogère et le savoir-faire dans le domaine technique qui en découle favorisent une intense activité de recherche et de développement. Cela se traduit par l’un des taux d’emploi les plus élevés de Suisse dans cette branche, ainsi que par de nombreux dépôts de brevets.
La région du Littoral, autour de la ville de Neuchâtel, se distingue particulièrement. Elle dispose d’une bonne accessibilité grâce aux infrastructures urbaines et à la présence d’une université. En outre, l’économie régionale s’appuie sur un large éventail de secteurs bien implantés. Les deux régions situées au-dessus du lac, celles de La Chaux-de-Fonds et du Valde-Travers, se caractérisent par la prédominance locale de l’industrie horlogère, et donc par leur dépendance vis-à-vis de celle-ci.
Supérieur à la moyenne suisse, le pourcentage de chômeurs de longue durée constitue l’un des défis du canton. Par ailleurs, la précarité des finances publiques et la forte imposition des personnes physiques qui y est étroitement liée pèsent sur les perspectives de croissance à long terme du canton, dans l’ensemble plutôt limitées. Toutefois, il s’agit là de domaines où une amélioration peut être induite par le monde politique.
>> Découvrez l’Indicateur de compétitivité des cantons 2021 d’UBS
Le Café du Coin est une initiative promotionnelle de L’Illustré et de la Schweizer Illustrierte, en collaboration avec DEAR Foundation-Solidarité Suisse et UBS Suisse.