«Je devais faire un exposé à l’école et j’avais choisi de parler de ceux qui n’ont rien au moment où nous allions nous régaler de bons plats et de cadeaux. Je ne connaissais pas Terre des hommes; j’ai décroché un rendez-vous avec Edmond Kaiser, son fondateur. A l’époque, il n’y avait pas internet, il fallait aller chercher les infos à la source, et il m’a donné beaucoup d’informations sur la situation au Biafra en proie à une grande famine; j’ai pris des notes, je voulais lui faire lire mon exposé une fois terminé, mais il m’a pris au dépourvu. «Faites-le devant moi comme si vous étiez en classe!» J’étais impressionné, c’était la première fois que je prenais la parole face à un adulte. A la fin, il m’a regardé avec un grand silence, je me suis dit: «Oups, il n’a pas aimé», et puis il m’a demandé mon âge; 12 ans! «C’est incroyable, m’a-t-il dit, c’est la première fois que j’entends quelqu’un me résumer l’essentiel d’une situation et ce qu’on peut faire plutôt que de rester les bras croisés! Vous avez envie de faire quoi quand vous serez grand?» J’ai parlé de mon envie de travailler dans l’humanitaire; du coup, il m’a donné rendez-vous quelques années plus tard… Je l’avoue, mon exposé devant la classe a eu beaucoup moins de succès. Il faut dire que le Richard qui arrive avec les enfants qui meurent de faim au Biafra juste avant Noël et les vacances, mes copains trouvaient que je plombais l’ambiance!
A 16 ans, je suis retourné voir Kaiser, qui se souvenait de moi. «Je voudrais toujours faire de l’humanitaire, mais je ne suis pas très bon à l’école ni avec mes dix doigts», lui ai-je avoué. «On s’en fiche, a-t-il répondu, je me souviens de votre exposé. Travaillez dans l’humanitaire, vulgarisez, racontez, expliquez!» C’est parti comme ça! Plus tard, je suis retourné le voir. J’ai dit à Edmond que je voulais faire de l’humanitaire, mais que je ne voulais pas gagner ma vie avec ça. Pour moi, à ce moment-là, c’était un peu comme militer contre l’apartheid et avoir un compte en banque. «Choisissez alors la proposition qui vous permettra de faire autre chose à côté!» La suite est connue. Je suis devenu bénévolement la voix de la Chaîne du bonheur. Mais c’est grâce à elle aussi que je suis entré à la Télévision et à la Radio suisses romandes. Bien sûr, c’est mon métier d’animer «La ligne de cœur» et «Chacun pour tous», mais avec le recul, ce qui a influencé mon destin, c’est que tout ce que j’ai voulu faire, je l’ai entrepris grâce au fait d’avoir choisi de ne pas gagner ma vie avec!
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La deuxième rencontre qui a eu un grand impact sur moi est liée à la fois à Terre des hommes et à la Chaîne du bonheur. J’étais allé en Roumanie pour parler des programmes d’inclusion des enfants roms à l’école mis sur pied et financés par ces deux institutions. Il y avait un Père Noël qui distribuait des bonbons aux enfants. Quand il a demandé au petit garçon de la famille que je suivais quel était son vœu le plus cher pour Noël, celui-ci a répondu: «Je n’en ai qu’un seul, aller à l’école.» J’ai dû m’accrocher à ma caméra pour ne pas être submergé par l’émotion. Cet enfant m’a ensuite expliqué qu’il voulait apprendre à lire et à écrire pour aider sa famille et ne pas devoir mendier comme son père. J’ai alors pris conscience qu’il n’y avait pas que l’aide en cas de catastrophe qui était importante et que l’éducation, c'était aussi une évidence. Ces deux rencontres font partie de celles qui ont transformé ma vie.»
Son actualité
Les 75 ans de la Chaîne du bonheur, avec une journée nationale de récolte de fonds pour l’enfance le 17 décembre. L’opération «Tout est possible» de la RTS, du 11 au 17.12, sur la solidarité. Et celle de «2x Noël», du 24.12 au 11.01, qui permet de déposer ou d’envoyer gratuitement des colis pour les démunis.