Et si la pandémie avait mis fin à certains privilèges? L’actualité met en exergue toujours plus de comportements de personnalités qui ne sont plus considérés comme acceptables. C’est le cas de l’antivax Novak Djokovic, de la star des apéros au 10, Downing Street Boris Johnson comme du grand voyageur avec l’avion de son employeur, le patron de Credit Suisse António Horta-Osório.
En 2021 déjà, on a vu une explosion des dénonciations de cas de harcèlement commis par de grandes figures. Comme s’il y avait eu jusque-là une prérogative qui permettait à certains arrivés tout en haut de la pyramide de s’affranchir des règles. Et que tout à coup cette licence leur était soudainement retirée. La raison d’un tel besoin de cohérence paraît limpide. La population s’est soumise à des règles très contraignantes ces deux dernières années. Pourquoi certains y échapperaient-ils?
Un confrère me confiait il y a près de vingt ans déjà que le fait de posséder son propre avion correspondait souvent au moment précis où un dirigeant perdait pied avec la réalité. La location et la propriété partagée de jets privés sont depuis passées par là. Mais il subsiste des indicateurs qui dénotent un pétage de plombs de certains membres de l’élite.
Le patron de Credit Suisse venu pour sauver la banque après les barbouzeries de son prédécesseur ne s’est-il pas dit que de se rendre à la finale de Wimbledon en Bombardier, au mépris des règles de quarantaine, pouvait être une énorme bourde? C’est tout le charme de la nature humaine: on peut avoir 50 ans et plus, être diplômé des meilleures écoles, comprendre la complexité de la finance et ne pas avoir plus de jugeote qu’un gamin de 10 ans.
«Ces comportements égoïstes, c’est un truc à devenir communiste», me lançait un ami banquier plus à droite que la moyenne de sa profession. Dans ce contexte, Ueli Maurer – qui hume l’air du temps comme le ferait un patient hautement sinusité – veut baisser les impôts pour les tranches supérieures. Au moment où les privilèges passent de plus en plus mal, où l’on apprend que la fortune des dix plus riches du monde a doublé pendant le covid et où le retour de l’inflation va peser sur le plus grand nombre, c’est pourtant bien un besoin de remise à niveau sociale qui se fait jour.