Des livres. Alignés soigneusement sur une grande étagère en face de la porte d’entrée. La littérature occupe une place de choix dans l’appartement comme dans le quotidien d’Eva Marzi, poétesse genevoise de 37 ans, diplômée en écriture littéraire de la Haute Ecole des arts de Berne. Travaillant à temps partiel à la Maison Rousseau et Littérature, elle consacre une partie de ses journées à la poésie, une activité qui a pris de l’ampleur après la fin d’une thèse de doctorat en sociologie. «Il y a eu une sorte de renaissance», confie la poétesse en évoquant une interruption d’une dizaine d’années.
Cette pause, intervenue pendant les études, s’est imposée dans une vie marquée très tôt par l’écriture. «Quand j’étais petite, je voulais vivre plein de choses, mais je ne pouvais pas parce que j’étais maladivement timide. Alors j’écrivais pour me raconter des histoires», sourit Eva Marzi. Au fil des ans, les textes se raccourcissent. Les émotions prennent la place des histoires. «Des crises d’ado, des mal-être comme tout le monde en a. J’écrivais des petites choses sur des coins de cahiers.»
La poétesse se remémore en souriant un épisode de ses années d’écolière. Un enseignant de français avait demandé aux élèves d’écrire tout au long de l’année. «J’ai rendu mon travail en me disant qu’il n’allait pas aimer.» Mais au moment du rendu, surprise: l’enseignant complimente les textes d’Eva Marzi. «C’est le premier lecteur que j’ai eu. Il m’a dit qu’il fallait que je continue, qu’il y avait quelque chose à développer. Pour moi, c’est un souvenir marquant parce que j’ai pris conscience qu’une chose venant de moi pouvait toucher une autre personne.»
Cet échange avec les lecteurs n’est pas chose évidente pour Eva Marzi. «C’est un peu une lutte d’écrire, ça ne coule pas de source. Il y a toujours une certaine appréhension: vais-je réussir à exprimer ce que je ressens et qui n’a pas de mots?» Si certaines personnes ne comprennent pas la poésie ou les émotions transcrites, d’autres lisent entre les mots. Un de ces épisodes est survenu lors de la présentation du recueil Nuit scribe au Printemps de la poésie en 2022. «Mon papa est venu vers moi à la fin d’une lecture, il m’a regardée et j’ai vu dans ses yeux que quelque chose l’avait touché et que c’était exactement ce que je voulais exprimer.» Cette année, Eva Marzi sera de nouveau au Printemps de la poésie, pour une performance en collaboration avec la danseuse Sarah Marie.
Le «matrimoine poétique» lance le printemps
Les femmes sont la tête d’affiche de la 8e édition du Printemps de la poésie, qui se déroule dans toute la Suisse romande. Deux semaines s’articulant autour de la thématique «L’élémentaire au féminin», une métaphore assignant l’eau, la terre, le feu et l’air à des poétesses. «Les femmes sont des éléments essentiels pour l’alchimie poétique et pour la construction de base de la littérature romande», argumente Laurence Iseli, cheffe de projet du festival. Lors des événements phares, les spectateurs pourront découvrir, notamment, des poèmes en musique lors de «Libertés, elles chantent ton nom» le 31 mars au Locle. Un brunch et des conférences prendront place notamment lors d’«Où sont les femmes? Brunch matrimoine» le 26 mars à Sion.
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