Elle inquiète toujours autant, reste incurable, mais la maladie d’Alzheimer commence à livrer des secrets clés. L’une des dernières révélations découle des investigations d’un consortium européen de médecins et scientifiques, dirigé par l’Unige et les HUG, qui a analysé près de 200 études déjà publiées. Parues dans la revue «Nature Reviews Neuroscience», leurs découvertes dévoilent un fait majeur: il n’y aurait pas une, mais trois maladies d’Alzheimer.
«Loin de complexifier la problématique, ce constat représente une véritable avancée dans la compréhension de cette pathologie si complexe, note Giovanni Frisoni, neurologue et professeur au département de réadaptation et gériatrie de la Faculté de médecine de l’Unige et directeur du Centre de la mémoire des HUG. Se distinguant par l’âge où surviennent les premiers symptômes, les facteurs de risque ou les caractéristiques biologiques de la pathologie, ce sont ainsi trois formes de la maladie qui apparaissent.
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La première, la plus rare mais aussi la plus agressive, est liée à des mutations génétiques héréditaires. Donnant lieu à des symptômes précoces (entre 30 et 50 ans), cette forme touche généralement plusieurs membres d’une même famille.
La deuxième forme concerne des patients porteurs d’une variation génétique – l’allèle E4 du gène ApoE. La maladie se déclare alors le plus souvent vers 65 ans, affecte surtout la mémoire et semble avant tout liée à la présence de protéines neurotoxiques.
Quant à la troisième forme, elle se manifeste autour de 75 ans, chez des personnes ne possédant pas cet allèle E4 dans leur code génétique, et semble résulter d’une multitude de facteurs (dont l’hygiène de vie). Elle engendre des symptômes diffus: plus encore que la mémoire, ce sont surtout les fonctions exécutives (langage, habileté, coordination, etc.) qui sont mises à mal. «Depuis une quarantaine d’années, le risque individuel de développer la maladie d’Alzheimer a diminué grâce à une meilleure prise en charge de facteurs de risque généraux comme l’hypertension artérielle ou le diabète. Aujourd’hui, des perspectives de recherche inouïes apparaissent en misant sur une prévention ciblée selon le profil des patients», se réjouit le Pr Frisoni.