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L'édito

Et si la Coupe du monde déraillait?

Stéphane Benoit-Godet s'interroge sur le bien-fondé de la Coupe du monde de football qui débutera le 20 novembre au Qatar. Va-t-on réussir à s'extasier devant les exploits des sportifs alors que 6500 ouvriers y ont laissé la vie? Pourra-t-on se réjouir des victoires des uns et des défaites des autres alors que la climatisation des stades en plein désert est un désastre écologique? Cette année sera-t-elle celle du boycott? Éditorial.

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La Coupe du monde de football débutera le 20 novembre au Qatar. Le désastre social et écologique qu'un tel événement engendre fait débat et certains semblent vouloir le boycotter.

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Stéphane Benoit-Godet, rédacteur en chef
Stéphane Benoit-Godet

Nous regarderons bientôt la Coupe du monde de football, qui débute le 20 novembre. Nous nous extasierons devant des stades gigantesques, des équipes valeureuses et des exploits sportifs. Des émotions et de belles histoires humaines. Mais à quel prix? Dans ce choix du Qatar pour accueillir un des plus grands événements sportifs de la planète, rien ne va. C’est un désastre en termes de droits humains et d’impact social: un nombre considérable d’ouvriers exploités ont finalement payé très cher leur «participation» à l’événement. Avec 6500 d’entre eux qui ont perdu la vie, cette édition du Mondial fait déjà figure d’un des chantiers les plus mal gérés de l’histoire.

D’un point de vue écologique, faire du foot en plein milieu du désert dans des enceintes climatisées qui ne seront plus jamais utilisées est une aberration. C’est servir la soupe à une monarchie où l’homosexualité est toujours un crime et, de manière plus générale, à ces Etats qui ne savent plus quoi inventer pour se rendre sympathiques. Certains se spécialisent dans la défiscalisation et le glamour de la réussite facile pour attirer les influenceurs (Dubaï), d’autres font dans la culture (Abu Dhabi) et d’autres encore dans le sport, comme le Qatar mais aussi l’Arabie saoudite. Cette dernière projette en effet de mettre la main sur le golf en promettant aux stars de la discipline des sommes astronomiques pour les attirer sur son nouveau circuit, baptisé LIV. On se souviendra que la Super League voulue par les grands clubs européens de foot s’était effondrée au printemps 2021.

Les fans avaient terrassé le projet en deux jours après avoir exprimé clairement qu’ils ne souhaitaient pas un nouveau système basé sur une seule motivation, faire plus d’argent. Et si la Coupe du monde au Qatar déraillait? Certes, on ne compte plus le nombre de grandes manifestations qui, à l’aube de se dérouler, ont été menacées de boycott et que rien ne fait dévier de leur ligne. Mais c’est compter sans notre époque où les effets de balancier se révèlent radicaux. La combinaison des aspirations d’une jeunesse mondiale inquiète des enjeux climatiques et soucieuse des libertés individuelles, d’une situation internationale très instable et d’une organisation sur place défaillante pourrait changer la donne.

Par Stéphane Benoit-Godet publié le 28 septembre 2022 - 09:12