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Enrico Marini, le bédéiste qui a dessiné Batman 

Installé à Liestal (BL), le bédéiste virtuose aux racines italiennes n’imaginait pas qu’un jour il signerait une aventure de Batman, super-héros de son enfance. Souvenirs.

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Enrico Marini

Enrico Marini a dessiné et scénarisé sa propre bande dessinée Batman, «The Dark Prince Charming». 

JOEL SAGET/AFP/Getty Images

«J’ai grandi avec les fumetti (comics italiens, ndlr), comme Tex Willer, que m’achetait ma grand-mère. Ça fait partie de ma culture italienne. J’étais aussi un fervent lecteur de comics américains, de Spider-Man et de Batman surtout. Il faut dire qu’en dehors de Tintin et Astérix, je ne connaissais pas la BD franco-belge. Cela a changé quand une petite librairie spécialisée s’est ouverte à Bâle. Là, j’ai découvert Herrmann et j’ai pris mon pied!

Enrico Marini

Pour Enrico Marini, Batman est une figure qui a marqué son enfance. 

Enrico Marini

A 14 ans, j’avais déjà écrit des histoire courtes et une longue de 50 pages. Je savais que j’en ferais mon métier. A l’époque, je rêvais de bande dessinée franco-belge. Pas sûr que j’aurais été capable de gérer, émotionnellement, si l’on m’avait confié la réalisation d’un Batman vers 18 ans.

En 2015, j’apprends que le patron de Dargaud dirige aussi Urban Comics, qui édite toute la production DC Comics. Un jour où nous dînons ensemble, je lui lance en déconnant: «Donc, si je fais mon propre Batman, tu le publieras?» Je n’y pensais pas sérieusement. Je travaillais au tome V des «Aigles de Rome» et j’avais déjà d’autres envies, mais il me répond: «Chiche! Je vois Jim Lee (dessinateur coréano-américain, référence actuelle des comics made in USA, ndlr) le mois prochain, je lui en parlerai!» Pour être franc, j’ai aussitôt oublié, mais, deux mois plus tard, il me rappelle: «Jim aimerait bien bosser avec toi sur Batman.» J’avoue que ça m’a flatté… et embarrassé. L’occasion se présentait et, faute de temps, j’étais presque contraint de refuser…

Enrico Marini

Un dessin de lui en super-héros, réalisé par Enrico Marini. 

Enrico Marini

J’ai demandé à réfléchir, soulignant que si j’avais une idée, je le ferais, mais seul. Sans scénariste. Je voulais voir si j’en étais capable. Au bout d’un mois, l’idée de «The Dark Prince Charming» avait germé et j’ai accepté.

Si on m’avait lancé sur Green Lantern, Thor ou Iron Man, j’aurais sûrement refusé, mais Batman, c’était mon enfance! J’ai eu carte blanche, tant au niveau de l’histoire que du choix des personnages, notamment le Joker qui, pour moi, est le méchant par excellence. Je n’ai reçu aucune directive. Un privilège.

Mon Batman ne s’inscrit pas dans la continuité des comics. Il peut être lu indépendamment des autres. Publié aux Etats-Unis et partout dans le monde, cet album en deux tomes a plu. Il m’a amené de nouveaux lecteurs – peut-être en ai-je perdu aussi? (il rit) –, des contacts, du travail.

Quand tu signes un album de Batman, tu rejoins le club en quelque sorte, obtenant le droit de dessiner n’importe quel super-héros, à condition que ce ne soit pas publié. Les éditeurs l’autorisent. C’est même une tradition aux Etats-Unis: l’occasion de gagner sa vie avec des dessins uniques. En Europe, la règle demeure la dédicace gratuite. Pas là-bas, où chaque travail est rémunéré.

Au final, on m’a proposé de refaire un Batman quand je le voudrai et ça, c’est tout ce que je voulais entendre.»

Le prochain album d'Enrico Marini

 

Enrico Marini nous décrit son prochain album: «Un polar intitulé "Noir burlesque", à venir en novembre. Une histoire en deux tomes de 90 pages chacun, en noir et blanc, avec des touches de rouge. L’atmosphère emprunte aux films noirs des années 1950. Des gangsters, des danseuses, du glamour: ça me change des légionnaires romains!»

Enrico Marini
Enrico Marini
Par Blaise Calame publié le 2 juin 2021 - 08:28