Depuis la semaine passée, il y a, au sommet de la Confédération, une voix enjouée qui s’exprime avec une franchise désarmante: celle d’Elisabeth Baume-Schneider, la surprise du chef, c’est-à-dire du parlement, l’institution la plus puissante du pays.
La Jurassienne de 58 ans (elle en aura 59 le 24 décembre) était pourtant destinée à essuyer sa toute première défaite électorale en vingt-huit ans de politique active. Mais sa fraîcheur lui a permis d’arracher ne serait-ce que la seule voix qu’il lui fallait pour battre sa concurrente bâloise, favorite mais dépourvue de charisme.
>> Lire aussi: Le village des Breuleux célèbre Elisabeth Baume-Schneider
Dans cette Helvétie du secret, peu friande, en politique du moins, de coups d’éclat, la nouvelle cheffe du Département fédéral de justice et police (DFJP) devra brider sa spontanéité. Son indépendance d’esprit avait provoqué des remous en 2004, deux ans après son élection au gouvernement jurassien. La ministre de l’Education avait rompu la collégialité en s’opposant à la décision d’ajouter une période d’enseignement hebdomadaire aux profs. «Cette prise de position m’avait valu une période de lune de miel auprès du corps enseignant, nous avait-elle dit ce printemps. Mais cette lune de miel avait cessé quand j’ai dû prendre la décision de fermer des classes. Ce désamour n’avait heureusement pas duré trop longtemps. Je me suis toujours appliquée à aller sur le terrain pour expliquer des décisions douloureuses.»
La nouvelle conseillère fédérale n’est donc pas que frondeuse en sachant aussi être pragmatique. Ce don d’adaptation lui a permis, contrairement à plusieurs autres chef(fe)s de l’enseignement en Romandie, de se faire réélire triomphalement deux fois à ce poste sensible. Elisabeth Baume-Schneider nous avait également rappelé que son tout premier jour au gouvernement jurassien, où les ministres n’avaient pas droit au moindre conseiller personnel, avait été un moment de solitude. Désormais, il va aussi lui falloir apprivoiser une pléthorique garde rapprochée de «spin doctors», d’huissiers, de chauffeurs et de gardes du corps.