Cette année de pandémie aura créé énormément de tensions. Que ce soit dans la population, les partis politiques ou la société en général, nous sommes à cran. On s’est excité sur les courbes, les statistiques, les tests, les masques et j’en passe. Mais il y a comme un coup de mou au moment où nous perdons du terrain sur ce qui constitue l’essentiel de la stratégie suisse en matière de lutte contre le covid: le vaccin.
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Où sont ces fichus vaccins? On nous annonce que tout sera en place pour mai-juin alors que le retard accumulé depuis le début de l’année ne sera jamais compensé. Chaque jour où on ne vaccine pas, c’est la perspective d’une vie normale qui s’éloigne. On ne sortira de cette crise qu’en ayant le plus de personnes traitées. Pourtant, la Suisse, qui adore figurer parmi les premières dans les classements internationaux, se contente dans cette situation si vitale de se comparer aux pays de l’UE, comme pour mieux se consoler. Là, effectivement, la vitesse de vaccination paraît légèrement supérieure chez nous.
Mais les ambitions très moyennes de nos voisins constituent-elles le bon objectif?
Les Etats-Unis ont procédé à deux fois plus d’injections par habitant que nous et prévoient en avoir terminé pour le 4 juillet. Le Royaume-Uni en a même réalisé trois fois plus et Israël dix fois plus. Ici, nous entendons nos autorités expliquer que cela relève du fédéral, que le cantonal prendra la suite opérationnelle (pendant que l’armée compte ses chars) et que tout le dispositif se mettra en place avec efficacité... dans deux mois.
Il est temps de se réveiller et de ne pas considérer comme une fatalité le fait que les labos ne parviennent pas à suivre. Ils sont largement payés pour fournir le vaccin, comme s’en attriste avec raison Didier Pittet. Ils doivent donc être au rendez-vous. Dans cette crise, nous avons découvert une Suisse pas si digitalisée que nous le croyions, une pharma complètement larguée alors que nous pensions être des champions et notre légendaire capacité de mobilisation en cas de crise évaporée.
Le sympathique chauvinisme qui s’est emparé de nous avec l’annonce du fait que Moderna allait sauver le monde depuis l’usine de Lonza, en Valais, ne doit pas nous endormir. Maintenant, on veut ces vaccins!