- Qu’est-ce que la dépression post-partum?
- Noémie Faure: C’est une maladie psychique qui touche entre 15 et 20% des mères, et près de 10% des pères/partenaires. Elle peut effectivement être très grave, mais il existe des formes légères et modérées également, plus fréquentes. Elle peut commencer pendant la grossesse ou jusqu’à un an après la naissance. Parmi les symptômes récurrents, on trouve l’épuisement, la perte d’espoir, l’anxiété, la culpabilité, le sentiment d’être un «mauvais parent». On la confond parfois avec le baby-blues, qui est un état de grand huit émotionnel très fréquent, bénin, et survenant dans la semaine après l’accouchement. Il ne dure que quelques jours et ne nécessite pas de traitement, contrairement à la dépression, dont la prise en charge rapide permet de limiter la souffrance.
- Quelles sont les «raisons» d’une telle dépression?
- Il existe un certain nombre de facteurs de risque, bien connus, dont le cumul peut favoriser l’apparition de la maladie. Citons de manière non exhaustive: antécédents de dépression ou de souffrances psychiques, peu de soutien social, problèmes de couple, situation de vie difficile. Mais ce qu’il faut retenir, c’est que la grossesse et le post-partum sont des périodes de grande vulnérabilité psychologique, même quand «tout va bien». Et de cette période de vulnérabilité, on n’en parle presque pas. C’est dommageable parce qu’elle peut prédisposer à l’apparition de maladies comme la dépression. En parler permettrait de faire un vrai travail de promotion de la santé psychique.
- Cette maladie relève-t-elle du tabou?
- Absolument. L’idée que l’arrivée d’un enfant puisse être compliquée est très peu «pensée» dans la société. Alors imaginer que cet événement dit «joyeux» puisse engendrer une dépression constitue un véritable tabou qu’il est effectivement indispensable de briser, sous peine de voir les parents s’isoler par honte et sentiment d’échec alors qu’ils ne sont pas responsables de cette maladie.
- Les soignants sont-ils suffisamment formés?
- Davantage de formation sur la santé mentale périnatale est nécessaire, d’autant que le manque de dépistage systématique freine une prise en charge rapide. Dans les cas sévères, les structures d’accueil spécifiques telles que les unités mère-bébé sont trop rares. Une prise de conscience politique est indispensable afin de mettre en place des mesures pour prévenir, dépister et traiter cette maladie.
- Comment réagir si on se sent concerné?
- En parler avec son conjoint, ses proches et ses professionnels de santé, consulter un psychiatre ou un psychologue et s’informer. En cas d’idées suicidaires, appeler ou se rendre rapidement aux urgences psychiatriques.
* Noémie Faure, basée à Vevey (VD) et à Châtel-Saint-Denis (FR), est consultante pour l’association Dépression Postpartale Suisse et membre du comité de pilotage pour l’établissement de lignes directrices nationales sur la dépression périnatale.
>> Plus d'informations sur www.postpartale-depression.ch et www.hug.ch/sante-psychique-perinatalite/qu-est-ce-qu-depression-perinatale
>> Vous avez des idées suicidaires, vous êtes inquiet·e pour un proche? Voici quelques ressources d'aide que vous pouvez contacter ou mobiliser:
- La Main Tendue (pour les adultes): composer le 143
- Pro Juventute (pour les jeunes): composer le 147
- Urgences médicales: composer le 144
- Police: composer le 117
- Liste des ressources disponibles sur stopsuicide.ch/besoindaide