Combes mystérieuses recouvertes d’épicéas, crêtes exposées au vent, cascades et grottes, le Jura envoûte et séduit par la richesse et la diversité de ses paysages si caractéristiques. Qui a déjà exploré une reculée, admiré l’arrondi parfait d’une doline ou traversé une cluse ne l’oubliera pas. Car, derrière ces formes géologiques, c’est l’histoire d’une terre qui se révèle.
Les racines de ce massif en forme de croissant remontent à plus de 25 millions d’années, lorsque le plissement des Alpes donne naissance au Jura. A l’échelle humaine, il semble solide, immuable et en impose par sa majesté, son immensité.
Un homme révèle pourtant une autre facette de ce géant, qui se dévoile avec poésie et fragilité l’espace d’un instant, le temps d’un lever de soleil, de l’envol d’une brume matinale.
Cet homme, c’est Nicolas Gascard, originaire des environs de Dole, passionné par sa région depuis tout jeune, lorsque son grand-père lui transmet l’amour de la géographie et de ces paysages sauvages qui avaient déjà inspiré Gustave Courbet. Depuis une quinzaine d’années, Nicolas capture son Jura avec un appareil photo, de part et d’autre de la frontière franco-suisse.
Réaliser ses rêves
Comme souvent, passion se conjugue avec travail intense. Etre là à l’instant précis où les derniers rayons traversent une couche de nuages pour enflammer les sommets enneigés ne s’improvise pas. Le photographe idéalise certains lieux, les imaginant sous différentes lumières. Puis il matérialise ses rêves en se plongeant dans les modèles météo.
Grand amateur d’orages et de phénomènes naturels, il a étudié la météorologie en autodidacte et sait qu’il doit connaître une partie des éléments pour prévoir le jour, l’heure, l’instant où l’éclairage sera fidèle à son concept. Le taux d’humidité, la vitesse du vent seront ses alliés dans sa chasse à l’image telle que visualisée dans son univers onirique.
Le moment venu, il ne reste plus qu’à partir sur le lieu, raquettes aux pieds en hiver, et à bivouaquer sur place la nuit pour être prêt à déclencher aux premières lueurs de l’aube, lorsque tout s’embrase, pour quelques instants, hors du temps. En trois minutes, la lumière peut changer, la luminosité baisser. Il s’agit d’être réactif.
Entre ciel et terre
Parmi les lieux qui le font vibrer, une place toute particulière est réservée aux crêtes du Jura, avec le Suchet, les Aiguilles-de-Baulmes, la Dent-de-Vaulion, toujours au lever du jour: on s’y sent alors «seul au monde, comme suspendu au-dessus du paysage, entre ciel et terre». Le panorama dévoilé, du Vercors aux Alpes bernoises, y est «le plus beau d’Europe, les lumières sur le Léman et le lac de Neuchâtel sont uniques», s’enthousiasme le jeune photographe.
Des valeurs essentielles
La force et la beauté du massif jurassien, resté à l’état brut, impressionnent. Le côté épuré, minimaliste, de ses paysages dégage une certaine sérénité. Face à l’homme destructeur qui porte atteinte à l’environnement, aux animaux, le photographe se sent un rôle de témoin.
Par ses clichés, il essaie de sensibiliser à son échelle. En transmettant ses valeurs essentielles: le Jura et ses vals accueillants, propices au silence et à la contemplation, sont autant de promesses d’explorations apaisantes où l’on se retrouve en paix avec soi-même. Des images comme une célébration de la nature, à la fois simple et vitale.