L’hiver arrive et, avec lui, une nouvelle inquiétude inédite dans les foyers suisses. Pourra-t-on compter sur un approvisionnement suffisant en énergie pour éviter des épisodes de paralysie partielle, voire totale de la Suisse? Et à quel prix? Des questions étonnantes dans un pays qui compte parmi les plus riches de la planète mais qui a justement trop longtemps compté sur sa bonne étoile pour déléguer à d’autres sa production d’énergie. La Suisse – petite par sa taille mais grande par ses succès – vit bien au-dessus de ses capacités dans pas mal de domaines. Pas un problème en soi. Sauf à se retrouver dans la situation où nous dépendons d’un dictateur qui peut décider du jour au lendemain de couper le robinet qui nous alimente. Là où nous en sommes!
A cause de ce manque de vista, le Conseil fédéral, qui avait misé sur un monde toujours plus ouvert, globalisé où la démocratie et le marché finiraient par triompher partout pour le meilleur – à sa décharge, comme la plupart d’entre nous –, a dû revoir sa copie. Imaginez, c’est comme quand vous vous remettez à vos cours d’allemand avec toute la bonne volonté de celui ou celle qui se dit: «Cette fois, je m’y mets…» Vous pouvez facilement imaginer que les premières tentatives ont donc été «basses de plafond». On a appris qu’il fallait prendre nos douches à deux, qu’il valait mieux mettre un couvercle sur les casseroles et qu’un interrupteur sert aussi à éteindre. Après deux ans à nous apprendre comment se laver les mains et porter un masque, les ministres troquent la blouse blanche pour le «bleu» de l’électricien.
Là, tous nos signaux d’un danger imminent s’allument: est-ce que l’on ne nous prendrait pas pour des andouilles? Après tout, on vote pour des gens supposés anticiper ce genre de crises. Ne seraient-ils pas en train de couvrir leurs arrières, de nous annoncer le pire pour s’excuser déjà par avance de ce que nous pourrions leur reprocher? Une sorte de remake du bug de l’an 2000. Mais nous sommes les Suisses, un peuple tempéré qui, au fond, trouve poussifs ses élus mais leur reconnaît aussi de s’en sortir pas si mal. Ces contraintes finiront peut-être par avoir du bon: c’est même le meilleur moyen de se rendre compte que nous devons prendre soin de cette planète. Cet édito terminé, je viens d’éteindre la théière: quelqu’un pour prendre une douche avec moi?