Depuis quatre ans, une petite merveille de technologie suisse gravite inlassablement autour de la planète Mars. Ces 5,5 kilos de savoir-faire évoluent à 76 millions de kilomètres de leur lieu de naissance, l’Université de Berne. Propulsé dans l’espace en mars 2016 avec la sonde ExoMars Trace Gas Orbiter, cet appareil travaille sans relâche depuis sa mise en fonction, le 21 avril 2018, au terme de deux ans de voyage dans le vide sidéral. Nommé CaSSIS, pour Color and Stereo Surface Imaging System (système d’imagerie de surface en couleur et en stéréo), ce petit bijou est l’œuvre de Nicolas Thomas, directeur de l'Institut de physique de l'Université de Berne, et de son équipe de chercheurs.
Chaque jour, les scientifiques bernois reçoivent de l’espace une vingtaine d’images de la surface de Mars. Faites le calcul: près de 30 000 photos ont déjà été rassemblées. Ces clichés, dont environ 60 à 70% sont utilisables scientifiquement, couvrent déjà 3% de la surface de la planète rouge. CaSSIS a aussi été conçu pour pouvoir prendre des images en 3D: l’appareil peut pivoter pour photographier le même endroit sous deux perspectives différentes, grâce à un système de rotation complexe. Relativement gourmande en énergie, cette technique n’est utilisée qu’avec parcimonie afin de sauvegarder les batteries.
CaSSIS a observé Mars sous toutes les coutures, depuis les anciens paysages érodés, les cratères et les volcans de toutes tailles jusqu’aux lacs asséchés et aux dunes de sable colossales, en passant par les amoncellements de glace, les tornades de poussières ou encore les avalanches. Il faut préciser que les images ne montrent pas tout à fait les vraies couleurs de la planète rouge. Une fois arrivés au sol, les fichiers bruts sont traités et enrichis pour mettre en valeur la diversité de la surface martienne. Guidé par les codes de l’analyse scientifiques, ce processus accentue les tonalités qui révèlent les différents types de minéraux et met en évidence la grande variabilité spectrale de la surface. Tous les géologues sur Terre peuvent alors étudier ces documents en termes de minéralogie et de lithologie de la croûte martienne. Créées pour la science, ces images, aux motifs presque abstraits, produisent pourtant des tableaux d’une beauté saisissante!