Star planétaire, sexe-symbole, Brigitte Bardot avait tout, en apparence, mais il lui manquait l’essentiel: une vraie raison de vivre loin du cinéma, «monde merveilleux et abominable». Elle va s’investir comme une guerrière dans la défense de la cause animale, amorcée en janvier 1962 sur le plateau de l’émission Cinq colonnes à la une. «J’étais passée pour dénoncer les abattoirs», confie-t-elle. Il faudra attendre 1977 et l’appui de Franz Weber pour que, à 43 ans, elle vive sa première croisade.
>> Lire aussi: Franz Weber vu par sa femme Judith
Vendredi dernier, elle réagissait à la disparition de son compagnon de lutte en déclarant: «Il est l’homme de ma vie.» On ajouterait de sa seconde vie. «Sans lui, je n’existerais pas. Il a pris le risque de m’accompagner pour défendre les phoques massacrés sur la banquise.» Ce fut le premier fait d’armes de Bardot, dont le monde moquait ce nouvel élan.
«Panache et prestance»
A l’époque, les chasseurs fracassaient le crâne des bêtes à peine nées afin d’épargner la fourrure, dont ils les délestaient en laissant dans la neige leur cadavre écorché. Encore fallait-il le faire savoir. «Franz Weber m’a appris le combat. C’est avec lui et grâce à lui que ces images écœurantes ont fait le tour du monde. Sa présence intimidait. Il faisait peur parce que la justice et le bon droit font peur quand ils sont incarnés avec tant de panache et de prestance», dit-elle.
Le 16 mars 1977 à Blanc-Sablon, au Canada, Franz et Brigitte répondent aux journalistes et aux chasseurs hostiles qui se sont glissés parmi eux. Le moment est électrique. Bardot: «Nous supplions le gouvernement canadien de trouver une solution. Le phoque est en voie de disparition. Il y en avait 10 millions, maintenant ils sont 800'000 à peine. Dans quelques années, il n’y en aura plus.» La voix de la pasionaria monte dans les aigus: «Même si la chasse aux phoques fait partie de vos traditions, eh bien les traditions changent. Et seuls les imbéciles ne changent pas d’avis!» Le ton est donné. Quelqu’un propose alors de montrer le corps d’un animal dépecé dans un sac en plastique. Bardot, épouvantée, craque.
En 2005, le massacre reprend
Aux images insoutenables s’en ajoutent de plus tendres. B.B. enlace un blanchon. «C’est cette photo que j’aimerais que l’on retienne après ma mort», dit-elle. Si le combat paya, après quelques années de répit, le carnage reprit. Le gouvernement canadien dénonçant une vaste campagne de désinformation.
En 2005, Bardot vint à Genève retrouver Franz Weber. Elle dénonça de nouveau: «Désormais, on rase les bébés phoques et on teint leur peau afin de les faire passer pour des loutres.» Deux ans plus tard, ils obtinrent une victoire décisive. «La Commission européenne a voté un embargo total sur les produits provenant des phoques et autres pinnipèdes. Grâce à Franz, nous avons gagné après trente ans de lutte.» Pleure-t-elle son ami aujourd’hui? «Je l’encense de toute ma reconnaissance. Il m’a transmis sa force, son pouvoir, sa détermination. Cet héritage que je continue à transmettre en son nom et en mémoire de lui.»