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Héros du quotidien

Le boulanger qui s'interdit de se montrer préoccupé

Boulanger-pâtissier à Courtételle (JU), Salvatore Mauro est un artisan passionné et un patron concerné. Il espère que nous saurons tirer les leçons de cette crise sanitaire. Deuxième portrait de notre série «Héros du quotidien».

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Salvatore Mauro, dans sa boulangerie-pâtisserie de Courtételle (JU). Pierre Montavon

«Depuis un mois, le chiffre d’affaires m’importe peu. Je suis à l’écoute de mon personnel, au service de ma clientèle. Tant que je serai debout, il y aura du pain!» Il est comme ça, Salvatore Mauro. Entier. A 46 ans, cet artisan boulanger passionné qui «travaille à l’ancienne» avoue s’être «un peu oublié» depuis que la Suisse combat le coronavirus.

A Courtételle (JU), il dirige Chez Salva, sa propre affaire, et veille sur ses neuf employés – deux ouvriers, trois apprentis, trois vendeuses et un livreur – dont la santé le tourmente. «Parfois, l’après-midi, j’ai beau être épuisé, impossible de dormir... J’y pense constamment, mais je me suis interdit de me montrer préoccupé. Je dois rester positif et responsable.»

Pour protéger son personnel, il n’a pas lésiné sur les mesures de protection, multipliées par étapes dès que le virus a atteint l’Italie, le pays d’origine de ses parents, calabrais. Gant unique pour le pain, gants jetables pour les vendeuses, solution hydroalcoolique à volonté, vitre en plexiglas. Désormais, il n’ouvre plus que le matin, «pour permettre au personnel de souffler». Et quand lui-même vacille, son épouse Patrizia, laborantine à l’hôpital de Laufon, est là pour le rassurer.

Fils de polisseur, Salvatore Mauro entretient une jolie histoire avec cette boulangerie où, ado, il a fait la vaisselle avant d’y effectuer son apprentissage. Vingt ans plus tard, en 2012, il la reprend, sollicité par des villageois. Chez Salva, le produit vedette, c’est le pain, le Surchaux par exemple, produit avec une farine de blé bio local. Il n’oublie pas les spécialités du Sud, friselle et taralli en tête.

Installé à Courfaivre, le village voisin, le couple Mauro a deux enfants: Elisa, 17 ans, et Matteo, un garçon de 15 ans, autiste. Si Salvatore a repris la boulangerie, c’est aussi pour lui: «Qui mieux que son papa pourra lui offrir un avenir?»

Depuis près d’un mois, «Salva» n’a plus embrassé ses parents. Ça lui manque. «J’espère qu’après cette catastrophe, on chérira ces gestes pas si anodins et qu’on saura se libérer un peu de cette course folle à la réussite qu’on subit tous.»

>> Lire le 1er épisode de la série: «Nous ne pouvons pas abandonner ces mères»


Par Blaise Calame publié le 8 avril 2020 - 08:12, modifié 18 janvier 2021 - 21:09