Eh bien oui, malgré le passe sanitaire, malgré l’inertie fédérale face aux risques climatique et énergétique, malgré les difficultés économiques, malgré les démonstrations de force répétées des antivax, les Suissesses et les Suisses apprécient majoritairement leur gouvernement: 67% des personnes questionnées (et ayant un avis) jugent l’action politique du Conseil fédéral très bonne (13%) ou plutôt bonne (54%). Deux tiers des citoyens s’estiment donc bien dirigés au niveau fédéral. Ce baromètre avait traduit par le passé un sentiment de mécontentement général.
Signalons aussi que cette perception positive est bien plus partagée en Romandie (76%) qu’en Suisse alémanique (65%). C’est auprès des personnes se situant à droite que l’enthousiasme est le moins perceptible (59% de satisfaits). Au centre et à gauche, on est en revanche satisfait à près de 80%.
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Dans le contexte de ces deux années marquées par la pandémie, ce résultat est inattendu. Il rappelle utilement que le mécontentement public qui s’exprime bruyamment sous forme de quelques milliers de manifestants dans certaines villes du pays jouit d’une couverture médiatique disproportionnée par rapport à la majorité silencieuse. Cette dernière, par définition discrète, s’est bel et bien accommodée des mesures de restriction qui ont rythmé, compliqué, voire bouleversé notre quotidien depuis le printemps 2020. Il faut encore mettre en évidence le faible taux d’avis très défavorables: 14%. Un citoyen sur sept seulement serait donc réellement fâché contre le Conseil fédéral et ses décisions de ces derniers mois.
Sur le plan individuel, ce baromètre divise le Conseil fédéral en deux: les cinq plus appréciés (entre 83 et 74% de satisfaction) d’un côté et les deux les moins convaincants (57 et 52% de satisfaction) de l’autre. Il n’est pas franchement étonnant de retrouver Ueli Maurer parmi les deux derniers de la classe. Le senior du gouvernement a largement dépassé l’âge légal de la retraite et accuse une certaine fatigue. Et s’il est encore apprécié à droite, plus d’un quart des sondés qui se disent conservateurs le notent quand même défavorablement.
La dernière place d’Ignazio Cassis est plus surprenante: pourquoi le Tessinois ne convainc-t-il qu’une personne sur deux? Pourquoi ne donne-t-il entière satisfaction qu’à 5% des sondés? Notre patron de la diplomatie paie-t-il ses quelques prises de liberté par rapport à la collégialité de rigueur? Est-ce son look juvénile et son éternel sourire un peu rêveur qui plombent sa crédibilité?
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Le seul cas à part de ce sondage parmi les sept Sages, c’est – on a envie de dire «bien sûr» – Alain Berset. Le chef de l’Intérieur accumule les records. Il suffisait déjà de vérifier l’intérêt qu’il suscite sur internet d’après l’outil Google Trends: il y écrase littéralement ses six collègues. On devine dès lors que les avis sur son action politique seront particulièrement contrastés. Et c’est bel et bien le cas. C’est en effet Alain Berset qui compte le plus de fans: plus d’un sondé sur trois (plus exactement 37,5%) lui décerne la note «très bonne». Dans cette catégorie, il écrase littéralement la concurrence puisque sa dauphine, Karin Keller-Sutter, ne comptabilise que 23,8% d’entière satisfaction, suivie de Simonetta Sommaruga avec 21,7%. C’est lui aussi qui s’attire le plus de foudres avec 14,4% d’avis très défavorables (suivi d’Ueli Maurer avec 12,5%).
Si on pondérait son taux de satisfaction en prenant en compte justement cet énorme taux de notes maximales, Alain Berset serait premier de ce sondage, à égalité avec Viola Amherd et Karin Keller-Sutter. Pas mal pour un ministre qui a traversé de grosses turbulences ces deux dernières années. Alain Berset est encore le plus connu des sept Sages, avec seulement 3% de sondés qui disent n’avoir jamais entendu son nom, contre 13% pour Viola Amherd et 10% pour Ignazio Cassis. Enfin, les sondés de gauche lui réservent un véritable triomphe avec 88% d’avis positifs (dont 54,5% d’entière satisfaction). La droite, en revanche, est particulièrement dure à son égard avec 26% de sondés qui jugent son action «très mauvaise».
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En comparaison, sa collègue socialiste Simonetta Sommaruga obtient des scores en accord avec sa personnalité réservée et pondérée: ce sont par exemple les sondés se situant au centre de l’échiquier politique qui l’adorent avec un taux de satisfaction stalinien de 97%.
Un mot sur le valeureux trio de tête: les deux premières places sont trustées par les dernières élues au Conseil fédéral, ce qui confirme, outre la qualité de leur travail, l’avantage d’apparaître encore jeune dans la fonction. Quant au très bon score de Guy Parmelin, il permet de vérifier que son année présidentielle souriante, collégiale et bonhomme, en dépit des circonstances sanitaires et européennes difficiles, a été payante.
Ce sondage confirme enfin que la loi covid devrait passer sans encombre ce week-end.
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«L’illustré» et son baromètre du Conseil fédéral: un hit-parade insolent vieux de 30 ans
Après une longue pause, notre magazine renoue avec ce sondage.
C’est dans son édition du 8 avril 1992 que «L’illustré» innovait en osant, via l’institut de sondage M.I.S Trend, demander aux citoyennes et citoyens suisses s’ils étaient satisfaits ou non de leur collège gouvernemental. Ce premier exercice avait donné une note d’ensemble sans concession: 31% de très ou de plutôt satisfaits et 45% de très ou de plutôt mécontents.
Sondage réalisé par internet du 8 au 14 novembre 2021 par l’Institut M.I.S Trend, à Lausanne, auprès de 652 citoyens suisses représentatifs âgés de 18 ans ou plus, soit 313 en Suisse romande et 339 en Suisse alémanique.
Marge d’erreur sur le total: +/- 3,8% (marge d’erreur sur les sous-groupes régionaux: +/- 5,5% pour la Suisse romande et +/- 5,3% pour la Suisse alémanique).