Aurélie Candaux et Nicolas Nyfeler modèlent leur voix pour la multiplier. On les entend dans des publicités pour MySwitzerland, Sunrise ou encore la Coop. On peut aussi les écouter au bout du fil, dans des messages préenregistrés nous demandant de taper 1 ou 2 selon le service recherché. Nicolas et Aurélie, couple complice et dynamique, ont fait du son leur métier. Tous deux originaires de la région neuchâteloise, ils ont été formés en partie chez RTN, la radio régionale de leur canton. Pourtant, leur rapprochement n’est pas lié au son. «On s’est rencontré à l’anniversaire de mon papa», sourit Aurélie. A cette époque, ses parents ont une entreprise de sérigraphie et collaborent avec l’agence de communication de Nicolas.
Premier contact avec la voix
Le début de carrière d’Aurélie est marqué par la publicité. Mais c’est au Cours Florent, à Paris, qu’Aurélie trouve sa voie. Elle y passe trois ans à se former à la comédie, puis rentre en Suisse et essaie de jouer. «Il n’y avait pas beaucoup de rôles dans la région à cette époque, donc il fallait que je trouve quelque chose qui s’approche de mon métier de comédienne. J’ai pensé à faire de la radio et je me suis adressée à RTN.» Formée par la station neuchâteloise, elle occupe le poste d’animatrice radio pendant neuf ans. En parallèle, elle commence petit à petit son activité de voix off, qu’elle exerce aujourd’hui depuis près de vingt-cinq ans.
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Nicolas, quant à lui, s’installe devant son premier micro à l’adolescence. «Très jeune, je me suis découvert une passion pour la radio. Dans les années 1980, la radio locale était à ses débuts. On laissait parfois des gosses de 15 ans prendre le micro. C’est comme ça que j’ai commencé.» Parmi le groupe de passionnés dont il fait partie, un seul rêve: aller à Paris et travailler pour les ondes de NRJ ou de Skyrock, en plein essor à cette époque. «J’ai fini par travailler pour Skyrock à Besançon, puis à Paris.» De retour en Suisse, il est embauché chez Rouge FM (anciennement Radio Framboise), puis chez RTN, où il rejoint le service commercial. «J’ai commencé à faire toutes les voix de pubs pour eux. C’est comme ça que j’ai mis le doigt dans l’engrenage.» La voix off suivra dès 1994.
Des missions de tous bords
Il suffit d’un coup de fil ou d’un courriel pour louer une voix. Une démarche simple, comme l’explique Nicolas: «Si on est disponible et qu’on accepte le mandat, on reçoit ensuite un e-mail avec les textes et les images. Très souvent, on se connecte et on enregistre à distance, dans notre petit studio à la maison. Nos mandataires reçoivent ensuite le son chez eux, que ce soit à Zurich, à Bâle, à Berne ou même à Hambourg ou à Vienne.» Aurélie souligne le gain de temps grâce à cette façon de procéder. «En revanche, il n’y a pas la qualité de la rencontre. Les clients aiment bien nous voir et c’est intéressant d’échanger avec eux en personne.»
Parmi les mandats, des demandes variées arrivent régulièrement. Spot radio, annonce dans les magasins, messages d’accueil sur un répondeur, publicités diffusées sur internet, films institutionnels ou encore e-learning: le couple passe d’un timbre, d’un accent, d’une intonation à l’autre selon le projet. Dans tout cela, y a-t-il un doublage qui leur a particulièrement plu? «Depuis tout petit, j’adore les avions. Alors quand j’ai dû faire le son sur des films pour la patrouille suisse, j’avais une certaine fierté», raconte Nicolas, qui n’a pas tout à fait perdu son âme d’enfant. Aurélie cite quant à elle la série de documentaires revisitant l’histoire du cinéma helvétique. «Il y a aussi des choses qu’on refuse. Par exemple, je ne travaille pas pour les partis politiques, quels qu’ils soient», précise-t-elle.
L’esprit entrepreneurial
En Suisse, l’Association des speakerines et speakers professionnels (VPS-ASP) édicte des tarifs indicatifs pour les enregistrements de voix off, payés à la prestation. Des indications qui rendent le travail plus confortable, selon Aurélie: «Les tarifs étant déterminés, on facture ce qui est marqué dans la tabelle. C’est très agréable, ça permet de ne pas baisser les prix et c’est ce qui fait que le métier tient.» Cette occupation leur permettrait financièrement de vivre, mais ce serait compter sans leur esprit entrepreneurial. «Je ne me vois pas assis à attendre que le téléphone sonne ou qu’un e-mail tombe, ce serait le pire truc qui pourrait m’arriver», confie Nicolas.
C’est pour cette raison qu’il a monté la distillerie Larusée, sise dans le Val-de-Ruz (NE). Collaborant avec le papa d’Aurélie, il a créé la marque de A à Z. «Mon beau-père a inventé la recette de notre absinthe et je me suis occupé de la communication et de l’administration. Lancer une marque depuis zéro, c’est le graal du communicant!» Non loin de là, Aurélie rejoint son bureau à domicile. Elle est agente d’artistes depuis 2017. Elle les conseille, suit leur carrière et vend leurs prestations et leurs spectacles aux salles. «Ils apprécient que je fasse l’intermédiaire, car c’est dur de négocier pour soi-même.» Elle a quitté les planches à jamais, mais, de sa vie de comédienne, elle a gardé sa voix off.